Les émotions ont mauvaise presse et souffrent depuis toujours d'un préjugé tenace. Les émotions, ce sont les « humeurs », ou encore les « passions » ? passivité de l'âme. Aujourd'hui encore, les hommes, bien souvent, ne doivent pas montrer leurs larmes, tandis que les femmes passent pour hystériques quand elles le font. Pourtant, ce sont nos émotions, ce que nous ressentons, qui nous rendent humains.
À rebours du développement personnel, c'est un guide philosophique des émotions que propose Ilaria Gaspari. Nostalgie, angoisse, gratitude, etc. : les mots que nous mettons sur nos maux ont une histoire, celle de toutes les personnes qui les ont vécues, dites, chantées, étudiées. En s'appuyant sur les plus grands philosophes et la littérature, des récits initiatiques d'Homère à Schopenhauer en passant par Spinoza, Ilaria Gaspari montre que ce qui est le plus intime est aussi universel : les émotions nous inscrivent dans la lignée des hommes.
À travers ce voyage émotionnel dans le temps et la philosophie, à partir de son expérience personnelle, Ilaria Gaspari enjoint à se reconnaître comme émotif afin de ne pas se laisser dominer par elles, ne pas les subir, ni les réprimer, mais les vivre et nous fier à ce qu'elles nous disent. Car c'est l'émotion que nous ressentons qui nous rappelle nos besoins profonds, qui nous rappelle que nous sommes humains.
Comment devrions-nous parler de sexe ? Du nôtre et de celui que l'on pratique ; un acte prétendument privé chargé de sens public ; une préférence personnelle façonnée par des forces extérieures ; un lieu où le plaisir et l'éthique peuvent se dissocier sauvagement. Depuis le mouvement #MeToo, beaucoup se sont attachés à la question du consentement comme cadre clé pour parvenir à la justice sexuelle. Pourtant, le consentement est un outil insuffisant. Pour appréhender le sexe dans toute sa complexité - ses ambivalences profondes, son rapport au genre, à la classe, à la race et au pouvoir - l'autrice souligne la nécessité d'aller au-delà du « oui et non », de l'acte voulu et du non désiré et interroge les relations tendues entre discrimination et préférence, pornographie et liberté, viol et injustice raciale, punition et responsabilité, plaisir et pouvoir, capitalisme et libération. Ainsi, elle repense le sexe en tant que phénomène politique. Incisif et très original, Le Droit au sexe est un examen historique de la politique et de l'éthique du sexe dans ce monde, animé par l'espoir d'une autre sexualité possible.
La Poétique de l'espace explore, à travers les images littéraires, la dimension imaginaire de notre relation à l'espace, en se focalisant sur les espaces du bonheur intime. Le « philosophe-poète » que fût Gaston Bachelard entend ainsi aider ses lecteurs à mieux habiter le monde, grâce aux puissances de l'imagination et, plus précisément, de la rêverie. Aussi l'ouvrage propose-t-il tout d'abord une suite de variations poético-philosophiques sur le thème fondamental de la Maison, de celle de l'être humain aux « maisons animales » comme la coquille ou le nid, en passant par ces « maisons des choses » que sont les tiroirs, les armoires et les coffres.
Il ouvre de la sorte une ample réflexion sur l'art d'habiter le monde, impliquant une dialectique de la miniature et de l'immensité, puis du dedans et du dehors, qui s'achève par une méditation des images de la plénitude heureuse, condensant les enjeux anthropologiques, métaphysiques et éthiques de cette oeuvre sans précédent.
« Philosopher, c'est penser sa vie et vivre sa pensée. Entre les deux, un décalage subsiste pourtant, qui nous constitue et nous déchire. A quoi bon tant penser si c'est pour vivre si peu ? On voudrait ici essayer autre chose : une philosophie à découvert, au plus près de la vie réelle, de ses échecs, de sa fragilité, de sa perpétuelle et fugitive improvisation. C'est ce que le mot d'impromptus, emprunté à Schubert, a paru pouvoir désigner à peu près. »
La mer est notre ressource pour respirer, pour nous nourrir, mais aussi pour rêver. Elle fait partie de notre environnement tout en constituant un autre monde, aussi effrayant qu'évocateur, un ailleurs radical. Cette altérité permet à Roberto Casati de la repenser dans une perspective inédite, de comprendre à quel point elle a fait de nous ce que nous sommes et ce que nous sommes appelés à devenir. Traversant l'océan à bord d'un voilier en marin-philosophe, il embarque le lecteur pour un véritable voyage initiatique. Naviguer dans un espace de liberté qui semble sans limite change radicalement le rapport à l'environnement, aux personnes et même aux objets. Le bateau devient alors une école de vie qui oblige à tout repenser pour agir autrement. La navigation donne vie à une forme de savoir actif, construit par l'action : une philosophie de l'océan.
Le contemporain démocratique nous invite, depuis quelques décennies, à penser le sexe et le genre. La légitimité de cette réflexion s'affirme enfin. Dans cet ouvrage qui réunit La controverse des sexes, La différence des sexes et un recueil d'articles inédits, la démarche privilégie l'« à côté » d'une recherche des définitions et des identités. Le passage conceptuel de « sexe » à « genre » demande une distance critique. C'est à partir d'un repérage des lieux dans une histoire de la pensée, philosophique, littéraire et factuelle que les questions philosophiques sont identifiées et développées par l'autrice. Car il s'agit de comprendre ce qui surgit quand égalité et liberté se révèlent comme des enjeux, dans la politique et la création, l'économique et le corps, la pensée et l'agir.
La longue histoire de la philosophie, quelques scènes littéraires contemporaines, et la mise à l'épreuve de débats récents, tout contribue à restituer l'importance de l'émancipation féministe au regard du monde.
Vous est-il arrivé de douter de la réalité du monde autour de vous ? Avez-vous déjà été hanté par certains indices troublants, par une sensation d'hallucination généralisée, par une impression tenace de mystification ? N'avez-vous jamais pensé que votre vie entière n'était qu'illusion, contrefaçon et même imposture ? Peut-être aviez-vous raison : il faudrait alors vous résoudre à vivre dans un monde factice. De Gabriel Tarde à Maurice Renard, de H. G. Wells à Philip K. Dick, David Cronenberg ou Ted Chiang, une riche lignée d'écrivains et de cinéastes a été obsédée par ce sentiment diffus d'irréalité. Ils ont, dans leurs récits, imaginé puis fait l'expérience d'une multitude de mondes faux, dans lesquels on croise, avec jubilation et inquiétude, des humains réduits à l'état de cobayes par des extraterrestres, des scientifiques fabriquant des simulacres d'univers ou des dieux défaillants infiltrant la psyché malade de leurs fidèles. En inventant ces mondes factices, souvent effrayants, toujours fantasques, écrivains et cinéastes sont devenus philosophes, et plus précisément métaphysiciens. Ils nous ont révélé un abîme sous nos rassurantes certitudes : une manière étrange et nouvelle de voir, de sentir et de penser le monde.
L'ouvrage débute par une définition très précise des termes « anarchie » et « anarchisme » et de leur histoire, en même temps que par un tour d'horizon des enjeux politiques contemporains qui rendent nécessaire une nouvelle réflexion sur ces termes et leur potentiel émancipateur, trop vite enterré ou méprisé (les anarchistes sont des nihilistes, des terroristes, etc.). Catherine Malabou s'interroge sur la raison pour laquelle certains des philosophes les plus importants du XXe siècle ont élaboré des concepts d'anarchie décisifs pour comprendre la situation contemporaine de la pensée en matière d'éthique et de politique sans jamais toutefois se référer à l'anarchisme. Comme si l'anarchisme était quelque chose d'inavouable, qu'il faudrait cacher alors même qu'on lui vole l'essentiel : la critique de la domination et de la logique de gouvernement. Au fil de l'interprétation critique de chaque philosophe se dégagent les éléments d'une pensée du « non gouvernable », qui va bien au-delà d'un appel à la désobéissance ou d'une critique convenue du capitalisme. Le livre propose donc une réinterprétation de l'anarchisme.
Quelles mutations conceptuelles travaillent la biologie contemporaine ? Deux grands cadres théoriques la structurent : la biologie moléculaire et la théorie synthétique de l'évolution. Mais depuis la fin du Projet génome humain en 2001 et le développement de la microbiologie, la biologie se transforme, avec l'irruption de nouveaux domaines. La philosophie doit s'efforcer de capter ce nouvel esprit biologique et de tirer les conséquences de ces révolutions conceptuelles. Doit-on procéder à un radical aggiornamento conceptuel : ne plus parler d'« espèce » mais de « symbiose », d'« organisme » mais d'« holobionte », de « mécanismes » mais de « processus » ? Mais la biologie ne risque-t-elle pas de devenir une bio-informatique ?
Penser le temps peut aider à mieux vivre, à condition de se défaire des métaphores qui assimilent la durée à un flux ininterrompu ou à une continuité mélodique. Contre Bergson, Bachelard soutient que la durée, loin d'être un tissu indéchirable, une enveloppe qui nous berce ou qui nous porte, a un caractère essentiellement composite. Elle se forme sur la base discontinue des actes de l'esprit. Pour vérifier cette thèse, Bachelard aborde tour à tour la psychologie de la mémoire et de l'action volontaire, les formes de la causalité en physique, l'observation des phénomènes quantiques, l'esthétique musicale et poétique, les compositions temporelles du sentiment, de la pensée abstraite et de la vie morale. Il en dégage cette leçon générale : durer, c'est ordonner de loin en loin des instants actifs ; c'est composer des rythmes. L'approfondissement métaphysique de cette idée conduit Bachelard à dégager ce qu'il tient pour le noyau « dialectique » de l'expérience temporelle, et plus généralement de la vie de l'esprit : l'oscillation entre activité et repos, être et néant. Le projet de « rythmanalyse » sur lequel débouche cette étonnante enquête suggère que le secret philosophique du repos est dans une existence bien rythmée. De nombreuses applications permettent d'en vérifier l'idée : de l'homéopathie à la chronobiologie, en passant par le travail poétique des ambivalences sentimentales ou l'analyse de « l'état lyrique ». Accompagnée d'une présentation, de notes explicatives, d'une table analytique, d'un index et d'une bibliographie, cette édition permettra à chacun de prendre la mesure de l'originalité et de l'audace d'un essai de philosophie expérimentale qui n'a rien perdu de son actualité depuis sa première publication en 1936.
Dès ses débuts, le punk feint la bêtise et revendique un certain « analphabétisme culturel ». Pourtant, comme genre musical et comme subculture, le punk a déployé un ensemble de valeurs politiques, sociales et de positions théoriques permettant de s'orienter dans l'existence, au point de faire naître des ouvrages de « philosophie du punk ». S'il est possible de détailler, dans toutes ses nuances, les éléments de cette philosophie en retrouvant leurs racines théoriques souvent souterraines - du transcendantalisme au situationnisme -, cet ouvrage adopte une autre démarche : étendre le champ d'action du punk dans le domaine de la pensée. Sans chercher à convertir une subculture en système philosophique, cet ouvrage cherche à montrer ce que le punk éclaire comme corpus théorique, afin d'ouvrir la possibilité de relire l'histoire de la philosophie à la lumière du punk
« L'exigence phénoménologique à l'égard des images poétiques est d'ailleurs simple : elle revient à mettre l'accent sur leur vertu d'origine, à saisir l'être même de leur originalité et à bénéficier ainsi de l'insigne productivité psychique qui est celle de l'imagination. » Mais comment et pourquoi vouloir inscrire les images poétiques créées par la rêverie, temps distendu, fuite hors du réel, dans « le lourd appareil philosophique qu'est la méthode phénoménologique ? » C'est le défi paradoxal auquel répond Gaston Bachelard dans ce livre :
« J'ai choisi la phénoménologie dans l'espoir de réexaminer d'un regard neuf les images fidèlement aimées ».
« L'animal ? L'autre », est le premier questionnement et le fil rouge de ce livre sur la passion des animaux selon Jacques Derrida. L'auteure lit l'oeuvre du philosophe de la déconstruction, qui reconnaît l'altérité et la différence de l'animalautre comme une expérience inaugurale, s'inscrivant dans le face à face avec un « animal » singulier, et qui s'appuie sur la dénonciation de la lacune abyssale implicite dans le terme générique « animal », qui a engendré tant d'équivoques dans la réflexion philosophique sur les animaux. Ce bestiaire repose sur l'ambition d'entamer un discours philosophique à propos de l'animalautre, en utilisant des mots et des concepts, mais aussi en le nourrissant de la vie réelle ou métaphorique des animaux, qui par leur présence silencieuse raisonnent autrement et donnent une vie et un mouvement nouveau à la réflexion conceptuelle.
Comment retrouver sa capacité d'agir quand les repères s'effondrent à la suite de crises ou de traumas ? Quelle conception du sujet rend justice à la dimension narrative de l'identité ainsi qu'au rôle décisif joué par autrui et par les normes sociales dans la constitution de soi ? Quelle philosophie de l'agir peut rendre compte de la condition d'un être soumis à la passivité, mais également capable d'initiative, et dont l'effort sans cesse recommencé pour définir les valeurs en lesquelles il croit, lui permet de vivre bien avec et pour les autres ? Telles sont les questions servant de fil directeur à ce livre. Issu d'un séminaire visant à rendre accessibles les thèmes principaux de Soi-même comme un autre, il est centré sur la notion d'attestation qui donne un contenu moral à l'identité et répond aux critiques des postmodernes. Corine Pelluchon montre la pertinence de l'herméneutique ricoeurienne pour penser le soin et le rapport entre éthique et politique, mais aussi pour trouver un équilibre entre universalisme et historicité, conscience de sa faillibilité et estime de soi.
Complexe et énigmatique car radicalement novatrice, la pensée nietzschéenne donne souvent le sentiment d'être labyrinthique. Ce sentiment se dissipe si l'on examine à quel moment se constituent les positions fondamentales du philosophe : la notion de pulsion, la théorie des valeurs, la logique du sentiment de puissance... Quand la philosophie est-elle comprise comme un dire-oui ? Dans quel ouvrage la tentative de lire la réalité tout entière comme volonté de puissance se fait-elle jour ? Patrick Wotling apporte une réponse à ces questions et montre que l'évolution de la réflexion de Nietzche est faite d'un affinement progressif au sein d'une problématique invariante : conquête d'un mode de pensée dont les grandes lignes sont dessinées dès La naissance de la tragédie.
Le sexe désigne communément le sexe biologique qui nous est assigné à la naissance (mâle ou femelle), le rôle ou le comportement sexuels qui sont censés lui correspondre (le genre), et, enfin, la sexualité. Les théories féministes s'attachent à la problématisation de ces trois acceptions mêlées du sexe. Elles travaillent à la fois sur les distinctions historiquement établies entre le sexe, le genre et la sexualité, sur leurs constructions et leurs relations.
S'agit-il d'une relation de causalité : le sexe biologique détermine-t-il le genre et la sexualité ? D'une relation de simultanéité non contraignante entre le sexe biologique, d'une part, et l'identité sexuelle (de genre et de sexualité), d'autre part ? S'agit-il d'une relation de normalisation ? L'hétérosexualité reproductrice est-elle la norme légale, sociale, mais aussi médicale, à l'aune de laquelle les catégories de sexe comme de genre peuvent être déconstruites, voire contestées et bouleversées ? Le présent volume porte sur les théories féministes de ces cinquante dernières années, dont la richesse et l'engagement en font l'un des champs les plus novateurs de la recherche actuelle : le féminisme marxiste, l'épistémologie ou l'éthique féministes, l'histoire et la philosophie féministes des sciences, le black feminism, le féminisme " post-moderne " et la théorie queer.
L'ensemble de ces pensées constitue aujourd'hui un véritable champ de la philosophie contemporaine, dont on trouvera ici une introduction et une problématisation particulièrement éclairantes.
Nous sommes les héritiers de la plus sinistre des histoires : celle qui a fait de l'amour un piège. De Adam et Eve aux séries contemporaines, elle n'a pas cessé d'être rejouée, définissant l'horizon de vie des femmes et des hommes errant sur la terre sous l'oeil mauvais du Démiurge. Il s'agit d'une histoire dans laquelle l'amour n'est pas ce qui sauve, mais ce qui enf erme ; il n'est pas ce qui rend bon et joyeux, mais triste et méchant, égoïste et cruel. L'amour est un sickamour - un amour malade. Comment faire pour en échapper ? Comment faire pour retrouver ce qui a été perdu lorsque, jaloux du bonheur d'Adam et Eve, Dieu décida de les flanquer à la porte du Paradis ? Telle est la question que s'est posé Pacôme Thiellement dans Sycomore Sickamour, une promenade hallucinée et somptueuse dans les méandres d'un savoir amoureux perdu, mêlant le théâtre de William Shakespeare et les textes gnostiques, les images de Jacques Rivette et celles de David Lynch, mais aussi Buffy et Clair de lune, Raymond Roussel et John Lennon, Gérard de Nerval et Martha & The Vandellas. Une promenade à la recherche du twist de l'amour heureux.
Dans les épreuves et les violences du monde contemporain. l'invivable est la pointe extrême de la souffrance, de l'injustice, et du soin qui peut et doit y répondre. Mais qu'est-ce qui est invivable ? Puisqu'il exige immédiatement une action et un soin, comment s'en prémunir et le réparer? Judith Butler critique les normes qui rendent des vies « précaires » et « invivables » (depuis Trouble dans le genre ), mais sans pour autant la lier à une philosophie de « la vie » ou du « soin ». Frédéric Worms, de son côté revendique un « vitalisme critique », pour lequel tout ce qui cause la mort relève de la vie, mais d'une manière différenciée selon les vivants, de sorte que « l'invivable » qui tue quelque chose en nous, reste littéralement vital et révèle la spécificité des vivants humains.
Mais tous les deux voient dans la différence entre le vivable et l'invivable le fondement critique pour une pratique contemporaine du soin. Pour l'un et pour l'autre, le soin complet rendra la vie humaine vivable, « plus que vivante ». Il faut s'appuyer pour cela sur les pratiques concrètes des humains confrontés à l'invivable, les réfugiés dans le monde contemporain, les témoins et les écrivains des violations du passé. Ce sont eux qui nous apprennent et nous transmettent ce qui dans l'invivable est insoutenable, mais aussi indubitable, et ce qui permet d'y résister.
Un dialogue transcrit et traduit d'une séance tenue à l'Ecole normale supérieure.
Entrer dans la pensée de Nietzsche implique de comprendre avant toute chose le déplacement de problématique qu'il impose à la philosophie. Du fait de la vision erronée qui a porté les philosophes à trahir l'exigence qui définit celle-ci, une réorientation de questionnement s'avère nécessaire, substituant désormais la problématique de la culture, c'est-à-dire l'enquête en termes de valeurs, à la traditionnelle, mais superficielle, recherche de la vérité. Cette redétermination fait alors apparaître la logique qui relie les notions structurant la réflexion nietzschéenne - valeurs, gai savoir, inactualité, réalité comme commandement, interprétation, philologie, sens historique - et dessine la véritable « tâche d'avenir du philosophe ». Elle révèle en effet que l'homme tel qu'il existe actuellement ne fut qu'un essai effectué sur les possibilités de vivre, qui sont loin d'avoir été épuisées, et que la philosophie elle-même prend ultimement la forme d'une tâche pratique, transformatrice, articulée à la recherche de formes nouvelles d'organisation de la vie, porteuse d'une « élévation de l'homme ».
" Nous voulions savoir dans quelle mesure notre conception de la durée était compatible avec les vues d'Einstein sur le temps. Notre conception de la durée traduisait en effet une expérience directe et immédiate. Sans entraîner comme conséquence nécessaire l'hypothèse d'un temps universel, elle s'harmonisait avec cette croyance très naturellement. C'étaient donc un peu les idées de tout le monde que nous allions confronter avec la théorie d'Einstein.
" Durée et simultanéité sont deux manières de penser les relations entre les systèmes temporels en mouvement dans l'Univers. Einstein ayant définitivement ébranlé la seconde, qu'en est-il de la première ? Telle est la question posée par Bergson dans ce livre, occasion d'une rencontre exceptionnellement profonde par son problème et ses enjeux, à travers une discussion scientifique et philosophique.
Depuis sa parution en 1922, la présente édition est la première édition critique complète de ce texte.
En 1966, Louis Althusser a 48 ans. Auréolé de l'énorme succès de Pour Marx et de Lire « Le Capital », il se lance dans une vaste recherche sur la possibilité d'une théorisation de l'idéologie. La thèse qu'il avance se résume en une phrase : l'idéologie est une pratique matérielle dont les fondements sont pour l'essentiel inconscients. L'homme étant un « animal idéologique », il ne peut pas être question d'échapper à l'idéologie. Mais il est possible d'élaborer un savoir scientifique de l'idéologique et du réel, susceptible de nourrir un projet d'émancipation sociale dont le but serait la création d'une société sans classes. Dans Socialisme idéologique et socialisme scientifique et autres textes, le philosophe jette ainsi les linéaments d'une théorie de la pratique politique qui renoue avec l'horizon révolutionnaire alors abandonné par le PCF - un horizon qui devra passer, selon lui, par la lutte idéologique avant toute autre. À l'heure où l'idéologie a pris, par la grâce des réseaux sociaux et des médias de masse, un visage ubiquitaire, ses enseignements sont plus vitaux que jamais.
Le petit Grégory, Alfred Jarry, Jack l'Éventreur, Ronald Reagan, David Bowie, Saddam Hussein, Edgar Allan Poe, Christine Chubbuck, Nicolas Sarkozy, Vincent Van Gogh, Mouammar Kadhafi, Martin Shkreli, Philip K. Dick, Nelson Mandela, Léona Delcourt, Otis Redding ou André Breton, qu'ont-ils en commun ces individus hantant le XXe siècle comme s'il était un théâtre grinçant ? Sans eux, l'histoire de ce siècle - notre histoire - serait incompréhensible. Car il y a les récits de manuels, avec ses grands hommes et ses grands événements. Et puis il y a le reste - les légendes dont est tissée la réalité, et qu'on ne peut raconter qu'au coin du feu ou dans l'ombre d'une porte, de peur de passer pour fou. Pacôme Thiellement n'a pas peur de la folie. Et lorsqu'il choisit de raconter « son » xxe siècle, c'est à travers le plus étonnant des réseaux de correspondance, où la poésie fait écho au fait divers, les stars médiatiques à d'obscures préoccupations mystiques et les nobles déclarations politiques aux tentatives incessantes de rendre la vie des humains impossible. Qu'y a-t-il donc de commun entre toutes ces figures ? Elles firent de la question « Qu'est-ce que vivre ? » celle du siècle dernier.