«Que vaudrait une vie sans désirs? C'est leur variété et leur intensité qui nous poussent à agir et nous donnent le sentiment d'être pleinement vivants.»Désirer vivre, ce n'est pas simplement être en vie. C'est nous laisser entraîner par l'élan vital qui nous conduit à créer, à aimer, à nous dépasser. C'est cultiver la puissance du désir qui est le moteur de nos existences. Pourtant, au quotidien, nous ressentons de nombreuses limitations - «Je ne suis pas capable», «C'est trop risqué», «Ce n'est pas pour toi» - qui nous inhibent. Nous sommes souvent aussi prisonniers des pulsions de notre cerveau primaire, le striatum, et de la propagande consumériste qui nous poussent à acquérir toujours plus. Comment cultiver la force du désir sans tomber dans le piège de l'insatisfaction permanente ou du mimétisme social? Comment développer notre puissance vitale sans nous autocensurer? Comment apprendre à orienter nos désirs vers des choses, des activités ou des personnes qui nous font grandir et nous mettent dans la joie?De Platon à René Girard en passant par Bouddha, Aristote, Épicure, Spinoza, Nietzsche, Jung ou Bergson, Frédéric Lenoir revisite les grands penseurs du désir pour nous proposer un livre lucide et vibrant, incarné dans nos problématiques les plus actuelles. Un ouvrage accessible à tous, qui aide non seulement à vivre, mais à vivre aux éclats.
«?Ça commence parfois par une inquiétude ou un malaise. On se sent en décalage, on craint d'agir de manière déplacée. On a le sentiment de ne pas «être à sa place». Mais qu'est-ce qu'être à sa place, dans sa famille, son couple, son travail ? Quels sont les espaces, réels ou symboliques, qui nous accueillent ou nous rejettent ? Faut-il tenter de conquérir les places qui nous sont interdites, à cause de notre genre, notre handicap, notre âge, notre origine ethnique ou sociale ? Peut-être faut-il transformer ces lieux de l'intérieur et s'y créer une place à soi ??» Dans cet ouvrage aussi passionnant que sensible, la philosophe Claire Marin explore toutes les places que nous occupons - quotidiennement, volontairement ou contre notre gré, celles que nous avons perdues, celles que nous redoutons de perdre - et interroge ce qui est à la fois la formulation d'un désir personnel et un nouvel impératif social. Encore reste-t-il à savoir si l'on finit tous par trouver une place, ou si le propre d'une place n'est pas plutôt de sans cesse se déplacer, ou de déplacer celui qui croit pouvoir s'y installer...
Qui aurait pu penser que l'antisémitisme puisse aujourd'hui relever la tête ? Sous couvert de défendre de nouveaux damnés de la terre, une certaine gauche passée à l'ennemi réactive l'antique théorie du bouc émissaire et désigne les Juifs et Israël comme les causes de toute négativité. Un rabbin et un philosophe se proposent de penser, l'un à partir de son judaïsme, l'autre de sa chrétienté sans Dieu, ce qu'il en est de Dieu, de son existence ou non, de sa responsabilité ou non dans le mal, mais surtout la nécessité de l'herméneutique juive et de la symbolique chrétienne pour fonder et conduire un dialogue, qui semble devenir la chose du monde la moins partagée.
M.O.
Si « l'antisémitisme renaît de ses cendres ? pardon !, de nos cendres » (Herbert Pagani), c'est peut-être en raison de l'assignation identitaire qui gagne. En eff et, pourquoi les Juifs, éternelles victimes expiatoires, échapperaient-ils à cette tentation mortifère de réduire l'autre à l'idée souvent fantasmée que l'on se fait de lui ? Là n'est pas le moindre des paradoxes d'un monde d'hypercommunication où l'on ne dialogue qu'avec celui qui nous ressemble. Pouvait-on imaginer un fossé plus large que celui qui sépare un croyant d'un athée, dépositaires de traditions de pensée si diff érentes ? Contre toute attente, un authentique échange s'est établi entre eux et s'est progressivement tissé autour d'un objet de questionnement, Dieu, qui semblait les vouer à ne jamais se rencontrer.
M.A.
Bruno Latour a souhaité revisiter ses cinquante années de recherches au cours d'un entretien en deux parties avec le grand reporter Nicolas Truong. C'est pour le philosophe l'occasion de reprendre et poursuivre les éléments les plus importants de sa pensée sur notre nouvelle condition terrestre. Il déploie ses réflexions à partir de cette conviction : si l'homme tient à sa survie en tant qu'espèce, il lui faut apprendre à s'émanciper des grands paradigmes qui le guident depuis les Lumières. Un plaidoyer pour la philosophie envisagée comme une tentative magnifique et impossible d'embrasser la totalité.
Une coédition avec Arte éditions.
«Ceci est un réconfort. À tous ceux qui ce matin se réveillent épuisés. À tous ceux qui souffrent de l'absence des êtres aimés. À tous ceux qui cheminent dans les forêts lointaines de leurs tourments. À tous ceux qui se sentent trop, ou peut-être pas assez. À tous ceux qui voudraient que leur journée rayonne sous un autre ciel. À tous ceux dont les larmes glissent sur le rebord du coeur. À tous ceux dont la gorge se serre à l'évocation d'un lieu, d'un nom, d'une pensée. À tous ceux qui ferment une porte derrière eux. À tous ceux qui ne savent plus comment faire. À tous ceux plongés dans la lumière crue d'un quotidien vengeur. À tous ceux qui ne trouvent plus leur place sur cette curieuse terre. À tous ceux dont les ressources s'épuisent. À tous les coeurs enragés que rien n'arrête.»Chaque matin, depuis plus de cinq ans, Marie Robert écrit un texte qu'elle partage sur les réseaux sociaux. Cette pensée du jour est devenue un rendez-vous quotidien pour près de 150000 personnes. Ce livre, illustré par douze collages originaux de Lia Rochas-Paris, est un recueil de ses textes les plus intemporels pour habiter la journée avec philosophie.
L'humanité a déployé assez d'intelligence pour mettre au point des machines qui explorent Mars, mais pas pour comprendre pourquoi et comment un bouchon mal vissé peut devenir un sujet de discorde. Explorant la dispute sous toutes ses coutures, ce livre résolument optimiste peut se résumer ainsi:«aucune souffrance n'est indispensable, aucune souffrance n'est gratuite».Une magistrale remise en perspective de nos errements, de nos insuffisances et de nos idéaux.
En décembre 1934, Simone Weil entre comme «manoeuvre sur la machine» dans une usine. Professeur agrégé, elle ne se veut pas «en vadrouille dans la classe ouvrière», mais entend vivre la vocation qu'elle sent être sienne : s'exposer pour découvrir la vérité. Car la vérité n'est pas seulement le fruit d'une pensée pure, elle est vérité de quelque chose, expérimentale, «contact direct avec la réalité».
Ce sera donc l'engagement en usine, l'épreuve de la solidarité des opprimés - non pas à leurs côtés, mais parmi eux.
L'établissement en usine, comme, plus tard, l'engagement aux côtés des anarchistes espagnols ou encore dans les rangs de la France libre, est la réponse que Simone Weil a trouvée au mensonge de la politique, notamment celle des dirigeants bolcheviks qui prétendaient créer une classe ouvrière libre, alors qu'aucun «n'avait sans doute mis le pied dans une usine et par suite n'avait la plus faible idée des conditions réelles qui déterminent la servitude ou la liberté des ouvriers».
Ce qui, toujours, a fait horreur à Simone Weil dans la guerre, qu'elle soit mondiale ou de classes, «c'est la situation de ceux qui se trouvent à l'arrière».
Des scientifiques, de plus en plus nombreux, nous promettent que la «?révolution de la longévité?» est pour demain, que nos petits-enfants pourront vivre cent cinquante ans, voire davantage, encore jeunes et en bonne santé physique et psychique. Ce livre fait le point sur ces recherches, sépare science et fantasmes et pose la question de fond?: à quoi bon vivre aussi longtemps?? Face à cette interrogation, deux conceptions de la vie heureuse s'opposent. La première nous vient de ces sagesses anciennes que la psychologie positive remet au goût du jour. Elles nous invitent à dire «?oui au réel?», à nous résigner à l'ordre naturel des choses afin d'accepter dans la sérénité la vieillesse et la mort. Les modernes philosophies de l'histoire et de la liberté plaident pour une tout autre spiritualité?: si une éducation tout au long de la vie, voire une perfectibilité potentiellement infinie, sont le propre de l'Homme, allonger la vie en bonne santé pourrait offrir à l'humanité l'occasion de devenir enfin moins bornée, moins violente, et, pourquoi pas, plus sage qu'elle ne le fut au xxe siècle. Ce sont les termes de ce débat désormais crucial que présente ce livre. L.F.
Les vieillards sont-ils des hommes ? à voir la manière dont notre société les traite, il est permis d'en douter.
Elle admet qu'ils n'ont ni les mêmes besoins ni les mêmes droits que les autres membres de la collectivité puisqu'elle leur refuse le minimum que ceux-ci jugent nécessaire ; elle les condamne délibérément à la misère, aux taudis, aux infirmités, à la solitude, au désespoir. pour apaiser sa conscience, ses idéologues ont forgé des mythes, d'ailleurs contradictoires, qui incitent l'adulte à voir dans le vieillard non pas son semblable mais un autre.
Il est le sage vénérable qui domine de très haut ce monde terrestre. il est un vieux fou qui radote et extravague. qu'on le situe au-dessus ou en dessous de notre espèce, en tout cas on l'en exile. mais plutôt que de déguiser la réalité, on estime encore préférable de radicalement l'ignorer : la vieillesse est un secret honteux et un sujet interdit. quand j'ai dit que j'y consacrais un livre, on s'est le plus souvent exclamé : " quelle idée ! c'est triste ! c'est morbide ! " c'est justement pourquoi j'ai écrit ces pages.
J'ai voulu décrire en vérité la condition de ces parias et la manière dont ils la vivent, j'ai voulu faire entendre leur voix ; on sera obligé de reconnaître que c'est une voix humaine. on comprendra alors que leur malheureux sort dénonce l'échec de toute notre civilisation : impossible de le concilier avec la morale humaniste que professe la classe dominante. celle-ci n'est pas seulement responsable d'une " politique de la vieillesse " qui confine à la barbarie.
Elle a préfabriqué ces fins de vie désolées ; elles sont l'inéluctable conséquence de l'exploitation des travailleurs, de l'atomisation de la société, de la misère d'une culture réservée à un mandarinat. elles prouvent que tout est à reprendre dès le départ : le système mutilant qui est le nôtre doit être radicalement bouleversé. c'est pourquoi on évite si soigneusement d'aborder la question du dernier âge.
C'est pourquoi il faut briser la conspiration du silence : je demande à mes lecteurs de m'y aider.
Peut-être avons-nous honte aujourd'hui de nos prisons. Le XIXe siècle, lui, était fier des forteresses qu'il construisait aux limites et parfois au coeur des villes. Elles figuraient toute une entreprise d'orthopédie sociale.
Ceux qui volent, on les emprisonne ; ceux qui violent, on les emprisonne ; ceux qui tuent, également. D'où vient cette étrange pratique et le curieux projet d'enfermer pour redresser? Un vieil héritage des cachots du Moyen Âge? Plutôt une technologie nouvelle : la mise au point, du XVIe au XIXe siècle, de tout un ensemble de procédures pour quadriller, contrôler, mesurer, dresser les individus, les rendre à la fois «dociles et utiles». Surveillance, exercices, manoeuvres, notations, rangs et places, classements, examens, enregistrements, toute une manière d'assujettir les corps, de maîtriser les multiplicités humaines et de manipuler leurs forces s'est développée au cours des siècles classiques, dans les hôpitaux, à l'armée, dans les écoles, les collèges ou les ateliers : la discipline.
Penser les relations de pouvoir aujourd'hui ne peut se faire sans prendre en compte l'ouvrage de Michel Foucault (1926-1984), devenu aussi indispensable à notre époque que le Léviathan de Hobbes le fut à l'époque moderne.
Si notre parole se libère heureusement pour dénoncer les injustices, les traumatismes, on constate qu'elle s'abime également en propageant les haines et les mensonges - par le harcèlement en ligne, les fake news, les trolls... Il faut sans doute le reconnaître : les mots font mal. Ils peuvent être des armes destructrices.
Voici la thèse défendue par Roger-Pol Droit et Monique Atlan, dans le prolongement de leur dernier livre, Le sens des limites (2021). Loin d'un pessimisme mortifère ou d'un constat d'échec, leur nouveau livre éclaire la puissance de la parole et propose des solutions pour comprendre notre responsabilité dans son usage. Pour les auteurs, il est essentiel et urgent de ré-apprendre à parler, pour sauver notre humanité.
Cet essai voudrait relier trois phénomènes que les commentateurs ont déjà repérés mais dont ils ne voient pas toujours le lien - et par conséquent dont ils ne voient pas l'immense énergie politique qu'on pourrait tirer de leur rapprochement.
D'abord la « dérégulation » qui va donner au mot de « globalisation » un sens de plus en plus péjoratif ; ensuite, l'explosion de plus en plus vertigineuse des inégalités ; enfin, l'entreprise systématique pour nier l'existence de la mutation climatique.
L'hypothèse est qu'on ne comprend rien aux positions politiques depuis cinquante ans, si l'on ne donne pas une place centrale à la question du climat et à sa dénégation. Tout se passe en effet comme si une partie importante des classes dirigeantes était arrivée à la conclusion qu'il n'y aurait plus assez de place sur terre pour elles et pour le reste de ses habitants. C'est ce qui expliquerait l'explosion des inégalités, l'étendue des dérégulations, la critique de la mondialisation, et, surtout, le désir panique de revenir aux anciennes protections de l'État national.
Pour contrer une telle politique, il va falloir atterrir quelque part. D'où l'importance de savoir comment s'orienter. Et donc dessiner quelque chose comme une carte des positions imposées par ce nouveau paysage au sein duquel se redéfinissent non seulement les affects de la vie publique mais aussi ses enjeux.
Depuis la terrible expérience du confinement, les États comme les individus cherchent tous comment se déconfiner, en espérant revenir aussi vite que possible au « monde d'avant » grâce à une « reprise » aussi rapide que possible. Mais il y a une autre façon de tirer les leçons de cette épreuve, en tout cas pour le bénéfice de ceux que l'on pourrait appeler les terrestres. Ceux-là se doutent qu'ils ne se déconfineront pas, d'autant que la crise sanitaire s'encastre dans une autre crise bien plus grave, celle imposée par le Nouveau Régime Climatique. Si nous en étions capables, l'apprentissage du confinement serait une chance à saisir : celle de comprendre enfin où nous habitons, dans quelle terre nous allons pouvoir enfin nous envelopper - à défaut de nous développer à l'ancienne ! Où suis-je ? fait assez logiquement suite au livre précédent, Où atterrir ?Comment s'orienter en politique. Après avoir atterri, parfois violemment, il faut bien que les terrestres explorent le sol où ils vont désormais habiter et retrouvent le goût de la liberté et de l'émancipation mais autrement situées. Tel est l'objet de cet essai sous forme de courts chapitres dont chacun explore une figure possible de cette métaphysique du déconfinement à laquelle nous oblige l'étrange époque où nous vivons.
La philosophie a pensé la vie, mais non pas vivre ; et le religieux, qui prenait en charge la question du vivre, est aujourd'hui en retrait. Ainsi « vivre » est laissé en friche, abandonné au prêche ou bien au truisme ; et de là prospèrent le Développement personnel et le marché du Bonheur, qui vendent vivre comme du « tout positif ».
Or, comme le montre François Jullien dans ce nouveau livre, vivre est paradoxal, s'étendant du vital au vivant. Il est à la fois la condition de toutes les conditions : être en vie ; et l'aspiration de toutes nos aspirations :
Vivre enfin ! Nous sommes en vie, mais nous n'accédons pas pour autant à vivre. De là que nous puissions être nostalgiques de la vie au sein même de la vie - ou que « la vraie vie est absente ».
Comment faire pour vivre ? Comment vivre enfin ? Car répéter qu'il faut « cueillir le jour », « profiter de la vie », n'est jamais très utile ou efficace...
Le philosophe de La Vraie vie trace donc plutôt, pour s'y repérer, une carte de ces possibles intensifs entre lesquels décider vivre. Vivre y reparaît alors dans sa ressource, dans son essor, dans son « matin », dégagé de ce qui l'enlisait, au fil des jours, et l'emmurait.
Telle est « la transparence du matin », en amont de tous les enseignements de la morale.
Publié en 1882, formé de 63 poèmes espiègles et des 13 Chansons du prince Vogelfrei, autant de récréations aux cinq livres qui constituent l'essentiel de cet ouvrage, Le gai savoir est à la fois une introduction à Ainsi parlait Zarathoustra et l'un des livres les plus puissants de Nietzsche. Après avoir été totalement abattu par les affres de la maladie et de la souffrance, avoir écrit, dans une lettre : « Je ne comprends plus du tout à quoi bon je devrais vivre, ne fût-ce que six mois de plus [...] », Nietzsche connaît une rémission qui le fait passer des bas-fonds au faîte de l'énergie et du dynamisme. A nouveau, il bouscule nombre de certitudes tout donnant les clés pour accepter notre condition et permettre à chacun de « danser sa propre danse ».
Aujourd'hui où l'on ne peut plus tracer de plan de la Cité idéale, et où les lendemains « ne chantent plus », peut-on faire autre chose que défaire ce qui bloque l'état présent des choses pour y rouvrir des possibles ?
Or, qu'est-ce qui bloque, si ce n'est des coïncidences idéologiques installées depuis trop longtemps, paralysant la société ? Ne pouvant les renverser (comment en aurait-on la force ?) et les dénoncer ne s'entendant plus, on ne peut que les fissurer : localement, sur le terrain, chacun en ayant l'initiative là où il est.
Mais ces dé-coïncidences se relient et se relaient, elle se répondent et peuvent s'associer.
Une Association en est née, dont chacun peut faire partie. Car c'est quand même avec des fissures que commencent à s'effondrer les cavernes.
« Mollesse du coeur », « mollesse des moeurs », « mollesse de tous » : la mollesse est, sous la plume de Tocqueville, l'un des traits saillants de l'individu démocratique. Inquiet de perdre ses biens, plein de sensiblerie, préférant la paix à la guerre, il a perdu tout l'éclat de l'aristocratie, de son courage, de son goût pour les émotions violentes et brillantes... et pour l'honneur. Paradoxalement, l'individu démocratique a beau être individualiste, il a perdu de son individualité, de sa singularité. Informe, noyé dans la masse difforme, soumis à une majorité sans tête, il est l'antihéros par excellence, qu'Alexis de Tocqueville nous met en garde d'incarner. Mais qu'y a-t-il de si effrayant dans la mollesse ? Pourquoi semble-t-elle plus périlleuse qu'un coup dur ? Est-elle forcément le synonyme de l'inaccomplissement ? La mollesse tant dévoyée, qu'on retrouve tout autant dans le laxisme, dans le coup de mou ou dans le dégoût du visqueux, qui se déverse tout autant dans les champs politiques, moraux ou esthétiques, n'a-t-elle pas une forme de positivité ? De la mozzarella au laxisme, de l'impuissance au jogging, du coup de mou au pouvoir de l'informe, la philosophe Géraldine Mosna-Savoye cherche dans cet essai à redonner sens et valeur au mou.
A la suite de "On ne peut vivre qu'à Paris" (7 500 ex vendus), Patrice Reytier illustre un nouveau livre à partir de fragments inédits de l'oeuvre de Cioran.
La Marchandise est 1e premier chapitre du Capital, dans la traduction française de Joseph Roy "entièrement révisée" par Marx lui-même.
Ce chapitre parut en France en 1872, au prix de dix centimes. Ainsi publié sous forme de petits fascicules, en livraisons périodiques, Le Capital, ouvre immense mais chère, "sera plus accessible à la classe ouvrière, et pour moi, déclare Marx à son éditeur français, cette considération l'emporte sur toute autre". Ainsi, en publiant à part ce premier chapitre du Capital, "Les Philosophiques" entendent prendre le voeu de Marx au sérieux et rendre accessible une ouvre fondamentale dont la taille risquerait de condamner le plus grand nombre à n'en rien lire du tout.
Il se trouve en outre que La Marchandise n'est pas un simple chapitre parmi d'autres, mais contient l'une des trouvailles les plus importantes de tout Le Capital, de l'avis même de Marx. Et aujourd'hui encore, pouvons-nous nier l'importance de ce concept de marchandise, nous qui baignons dans un monde de marchandises et qui affirmons que l'école, la santé, le monde ne sont pas des marchandises ? Mais savons-nous au juste ce que c'est qu'une marchandise ? Pour ne pas se contenter de juger et de condamner le présent, La Marchandise nous offre les moyens conceptuels de le comprendre.
Les émotions ont mauvaise presse et souffrent depuis toujours d'un préjugé tenace. Les émotions, ce sont les « humeurs », ou encore les « passions » ? passivité de l'âme. Aujourd'hui encore, les hommes, bien souvent, ne doivent pas montrer leurs larmes, tandis que les femmes passent pour hystériques quand elles le font. Pourtant, ce sont nos émotions, ce que nous ressentons, qui nous rendent humains.
À rebours du développement personnel, c'est un guide philosophique des émotions que propose Ilaria Gaspari. Nostalgie, angoisse, gratitude, etc. : les mots que nous mettons sur nos maux ont une histoire, celle de toutes les personnes qui les ont vécues, dites, chantées, étudiées. En s'appuyant sur les plus grands philosophes et la littérature, des récits initiatiques d'Homère à Schopenhauer en passant par Spinoza, Ilaria Gaspari montre que ce qui est le plus intime est aussi universel : les émotions nous inscrivent dans la lignée des hommes.
À travers ce voyage émotionnel dans le temps et la philosophie, à partir de son expérience personnelle, Ilaria Gaspari enjoint à se reconnaître comme émotif afin de ne pas se laisser dominer par elles, ne pas les subir, ni les réprimer, mais les vivre et nous fier à ce qu'elles nous disent. Car c'est l'émotion que nous ressentons qui nous rappelle nos besoins profonds, qui nous rappelle que nous sommes humains.
La question animale attise les passions, mais, au fond, pourquoi? Si Corine Pelluchon estime que la mise à mort d'un animal élevé pour sa chair est moralement problé-matique, Jocelyne Porcher, qui fut éleveuse, considère que c'est par le prisme du travail qu'il faut interroger la place de la mort dans nos relations avec les animaux.Cette question abyssale - a-t-on le droit de tuer des animaux? - est au coeur de l'argumentation des deux auteures qui font part de leur expérience, en partageant leurs certitudes comme leurs doutes.
Certains ne lui accordent qu'une place secondaire ou voudraient même l'effacer. D'autres prétendent en faire un absolu. Mais de quoi parle-t-on quand on dit « nation », et que recouvre ce mot ? De la culture d'un peuple ? De sa volonté de vivre ensemble, de partager un destin et un idéal communs, et de faire valoir un héritage ? Ou bien de tout autre chose : de l'institution de services publics découlant de la reconnaissance du principe de dignité humaine ?
Peut-on concevoir un individu sans nation, et, réciproquement, une nation sans individus ? Quelle relation la nation et l'État doivent-ils entretenir ? Sans une réelle souveraineté de la nation, l'État ne risquet- il pas de devenir un organe technocratique se détournant de l'intérêt général et de la justice sociale ?
Cet essai propose de lever les confusions les plus répandues, à droite comme à gauche. En remettant la nation à sa juste place, notre démocratie ne pourrait-elle pas surmonter les divisions qui la minent, qui sapent la société et qui l'exposent à la tentation totalitaire ?
Les sciences humaines d'aujourd'hui sont plus que du domaine du savoir : déjà des pratiques, déjà des institutions. Michel Foucault analyse leur apparition, leurs liens réciproques et la philosophie qui les supporte. C'est tout récemment que l'« homme » a fait son apparition dans notre savoir. Erreur de croire qu'il était objet de curiosité depuis des millénaires : il est né d'une mutation de notre culture. Cette mutation, Michel Foucault l'étudie, à partir du XVIIe siècle, dans les trois domaines où le langage classique - qui s'identifiait au Discours - avait le privilège de pouvoir représenter l'ordre des choses : grammaire générale, analyse des richesses, histoire naturelle. Au début du XIXe siècle, une philologie se constitue, une biologie également, une économie politique. Les choses y obéissent aux lois de leur propre devenir et non plus à celles de la représentation. Le règne du Discours s'achève et, à la place qu'il laisse vide, l'« homme » apparaît - un homme qui parle, vit, travaille, et devient ainsi objet d'un savoir possible.
Il ne s'agit pas là d'une « histoire » des sciences humaines, mais d'une archéologie de ce qui nous est contemporain. Et d'une conscience critique : car le jour, prochain peut-être, où ces conditions changeront derechef, l'« homme » disparaîtra, libérant la possibilité d'une pensée nouvelle.