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Lettres à une jeune femme : et autres écrits sur l'amour ; souvenirs sur Rilke
Rainer Maria Rilke, Katharina Kippenberg
- Arfuyen
- Les Vies Imaginaires
- 8 Février 2024
- 9782845903630
« Tout ce discours sur la libération du monde, écrit Lisa Heise à Rilke en août 1919, n'est-il pas vain tant que la justice reste incomplète dans les relations entre l'homme et la femme ? Pourquoi l'homme est-il si mal préparé à l'amour ? ».
Rilke n'a cessé de s'interroger sur l'amour et sur ces grandes amoureuses - de Sappho, Gaspara Stampa, la Religieuse portugaise - qui l'ont porté, à travers les souffrances de l'abandon, à ses plus hauts accomplissements. Et voici qu'une jeune femme, laissée seule sans moyens avec son fils, lui demande conseil et réconfort : au livre qu'il a toujours voulu écrire sur ce thème s'ajoute le chapitre manquant.
C'est en 1930, un an après la parution des Lettres à un jeune poète, que paraîtront ses Lettres à une jeune femme. Traduites en de nombreuses langues, elles n'ont jamais paru en France en intégralité. Elles sont pourtant du plus haut intérêt tant du fait de la personnalité singulière de Lisa Heise (1893-1969), pianiste, horticultrice et écrivaine, que de l'attention lucide et bienveillante qu'accorde l'écrivain à cette jeune inconnue.
Le présent ouvrage rassemble au côté des Lettres à une jeune femme un large ensemble des écrits sur l'amour de Rilke : « Les livres d'une amante », « Sur la Portugaise », « Celles qui aiment » et 18 poèmes d'amour dont le dernier intitulé « Pour Madame Lisa Heise ». Le texte de K. Kippenberg, amie proche de Rilke, évoque son rapport particulier avec les femmes. -
Juillet 1919. La narratrice arrive à son chalet de montagne, dans le Valais suisse qu'elle n'a pas revu depuis le 1er août 1914. Fatiguée et déprimée, elle s'effondre dans l'herbe avant même de franchir le seuil. « C'est tellement humiliant d'être à ce point bouleversée. Je me sens aussi ridicule que malheureuse ; comme si quelqu'un avait pris mon visage et l'avait frotté de poussière. » Mais tout de suite, grâce à la magie de l'écri-ture d'Arnim, le paysage est là, dans son immensité. Naguère bruissante de vie et de gaieté, la maison est à présent silencieuse. Seuls avec la narratrice, le couple de gardiens qui voit d'un mauvais oeil qu'on vienne déranger ses habitudes. Ils parlent en français dans le texte, d'où de savoureux dialogues où l'élégante Londonienne se trouve, malgré son permanent humour et sa bonne volonté, souvent en position difficile. Mais cette sorte de tranquillité ne durera pas : une situation des plus étranges s'instaure avec l'arrivée de deux femmes venues de nulle part et marquées par un lourd secret. Kitty, terriblement convenable et polie, et Dolly, sa cadette, toujours souriante et silencieuse. Au premier étonnement, succède l'inquiétude et une brûlante curiosité. Le huis clos devient confrontation et se développe en une enquête quasi policière. L'art d'Elizabeth von Arnim, d'une fascinante finesse psychologique et d'une réjouissante ironie, est de nous entraîner jour après jour à sa suite. Jusqu'à une fin imprévisible et merveilleusement « british ».
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Introduits par le livre de thel (1789), figure de la prise de conscience enfantine de la mort, le mariage du ciel et de l enfer (1793) et l'évangile éternel (1818), réunis ici pour la première fois en seul volume, sont les deux " réécritures " blakiennes de la torah juive et des évangiles chrétiens.
Blake l'affirme lui-même : il veut écrire une autre bible - il va jusqu'à évoquer une " bible de l'enfer ". messie négatif, transgresse-t-il la " loi " pour mieux l'affirmer ? de quel " exil " serait-il la promesse enfin tenue ? au-delà des " influences " et des " sens ", qu'est-ce qui motive le poète ? blake n'est pas, comme le voulut bataille, un poète du mal. il " montre " le mal, mais c'est pour le fondre dans la contradiction universelle, pour démontrer qu'il mène à la possibilité du bien ! il s'en prend vigoureusement aux " institutions ", mais sa bible noire et son evangile blanc sont des approches poétiques et mystiques qui dessinent les contours de la même loi fondamentale : il y a du symbolique et ce champ est la dimension et l'espace du père.
Excellent connaisseur de la bible et de la kabbale - jusqu'à apprendre l'hébreu pour les lire dans le texte -, loin de vouloir brûler les livres, il en rappelle l'évidence poétique. le feu qui y brille est celui de la révolte intérieure, de l'aspiration à l'absolu, l'appel sans fin à la transgression suprême et quotidienne. alain suied.
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L'oeuvre poétique Tome 1 : Le code de la nuit
Dylan Thomas
- Arfuyen
- Neige
- 8 Février 2024
- 9782845903623
Né à Swansea sur la côte du pays de Galles, mort à 39 ans à New York, Dylan Thomas (1914-1953) est un de ces poètes météores, comme Keats, Trakl ou Hart Crane, dont l'oeuvre intense et déroutante ne cesse de nous interroger. « Chaque ligne demande à être comprise, écrivait-il lui-même ; on demande au lecteur de comprendre chaque poème en y réfléchissant et en y reportant son émotion. ».
L'oeuvre de Dylan Thomas nous met au défi en tant que lecteurs, auditeurs et compagnons d'humanité : elle nous somme de nous aboucher avec sa verve éclatante, de nous acoquiner avec la poissonnière sur le quai, avec les musicastres et les ferrailleurs, avec les cloches et les sirènes, avec les corbeaux et les mouettes, et tout le reste, « toute la boule d'écume et de vagues du monde ».
Les trois recueils regroupés en ce premier des deux volumes de l'édition bilingue de L'OEuvre poétique font bloc à la fois dans le temps et dans l'écriture. Ils tracent déjà un portrait achevé du jeune poète gallois. C'est en 1934 que paraît son premier recueil, les 18 Poems (18 poèmes) : il a vingt ans. Deux ans plus tard sont publiés se Twenty-five Poems (Vingt-cinq poèmes) et en 1939 The Map of Love (La Mappemonde de l'amour) dont les derniers vers, rédigés pour son 24e anniversaire, sonnent comme une épitaphe : « Tiré à quatre clous, à l'entame de la parade sensuelle, / Des sous rouges plein les veines, / En route vers la ville élémentaire, dans sa direction finale / J'avancerai aussi longtemps que toujours sera. ». -
Fumiko Hayashi est une des figures majeures de la littérature japonaise. Beaucoup de ses nombreux romans et nouvelles ont été adaptés au cinéma par le grand réalisateur Mikio Naruse, et notamment le chef d'oeuvre de ce dernier Nuages flottants (1955).
Plusieurs de ses textes ont été traduits en français : par Corinne Atlan, Nuages flottants (Rocher, 2005) et Les Yeux bruns (Rocher, 2007) et par René de Ceccatty Vagabonde (Vendémiaire, 2022), ainsi que plusieurs nouvelles chez Gallimard et Picquier.
La tonalité d'Hayashi est très proche de celle d'Ishikawa Takuboku, lui aussi révolté par une société patriarcale et répressive, qu'elle cite fréquemment.
C'est en 1930 que Fumiko Hayashi a acquis une précoce notoriété en publiant Vagabonde, son journal romancé. Les onze nouvelles ici réunies datent des années 1930-1948, sa période de maturité.
Un pays dévasté, où les journées se passent à chercher un emploi, un toit, de la nourriture. On entend voler des avions américains. Certains hommes sont partis se battre dans une guerre que l'on ne comprend pas. D'autres ont tenté l'aventure en Mandchourie. Des enfants, des épouses, des amis ont disparu.
Et pourtant, dans cette ambiance de désolation, une forme étrange de sérénité, comme si les destinées individuelles comptaient moins qu'un moment de beauté ou qu'un sourire de bonté sur un visage. Comme si seul importait ce chant mystérieux de la flûte pour éviter de « perdre l'espoir, quelle que soit l'adversité ». -
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La vie d'un poète : poèmes et écrits sur la poésie
Stefan Zweig
- Arfuyen
- Les Vies Imaginaires
- 3 Juin 2021
- 9782845903135
« On n'aime rien tant que ses poèmes, écrit Zweig en 1905 : ce sont les seuls textes dont on se prend parfois à rêver qu'ils soient achevés, qu'ils aient leur vie propre et qu'ils ne puissent plus mourir. » Stefan Zweig a beaucoup écrit : nouvelles, théâtre, essais, biographies. Son succès a été immédiat et considérable. Il demeure aujourd'hui un des auteurs les plus lus. Et par les publics les plus différents.
« De tous les auteurs que je connais, écrit-il cependant, je suis celui qui déteste le plus son soidisant succès ». Il s'étonne du succès que reçoivent ses proses et se désole d'en être devenu l'otage. Car c'est toujours à la poésie qu'il donnera la première place : « J'ai l'impression d'être un chasseur qui en réalité est végétarien, et à qui le gibier qu'il doit tuer ne procure aucune joie. » « Le chasseur végétarien », tel est le titre de la préface du présent volume. C'est une sorte d'autobiographie de Zweig en poète qui est ici donné :
Ce poète qu'il a toujours rêvé d'être, sur les traces des idoles de sa jeunesse, Hofmannsthal et Rilke.
Zweig a écrit des poèmes toute sa vie. Il a publié trois recueils de poésie : en 1901, en 1905 et en 1922.
Et il n'a cessé d'écrire à la gloire des poètes, de Kleist et Hölderlin à Verhaeren et Rilke. Ces textes ici réunis (et, pour les poèmes, traduits pour la première fois en français) constituent le journal d'une vie, la « vie rêvée » de ce poète qu'il brûlait d'être et qu'il est mort, peut-être, de n'avoir pu être pleinement.
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Dans son Journal Etty Hillesum évoque avec admiration un livre de Rilke qu'elle est en train de lire : Über Gott (Sur Dieu). Ce livre a été publié par Carl Sieber en 1934 chez Insel. Époux de Ruth, la fille unique de Rilke, Sieber fut avec elle l'éditeur de la correspondance de Rilke (6 volumes, 1936-1939).
Dans sa première édition, ce volume comprenait, outre une riche préface de Carl Sieber, la lettre à H.P.
Du 8.11.1915 et la lettre à M. V., de février 1922, toutes deux rendant compte de la réflexion de Rilke sur Dieu et sur les religions. Le travail d'édition de la correspondance de Rilke lancé par Sieber n'avait pas encore pu être mené à bien et révéler plusieurs autres lettres tout aussi essentielles sur ce même thème.
Une nouvelle édition de Sur Dieu ne pouvait aujourd'hui laisser de côté ces dernières si l'on voulait avoir une vue vraiment juste de l'itinéraire spirituel de Rilke. C''est pourquoi la présente édition a été enrichie de trois autres lettres d'une importance majeure : la lettre à Ilse Blumenthal-Weiss du 28.12.21, la lettre à Margarete Sizzo-Noris-Crouy du 6.01.23, enfin la lettre à Witold Hulewicz du 3.11.25.
L'ensemble est précédé d'une étude intitulée « Sur le message spirituel de Rilke ». Message essentiel et passionnant, en effet, mais aussi d'une incroyable modernité : « Rilke, écrivait le grand écrivain Robert Musil, a été, dans un certain sens, le poète le plus religieux depuis Novalis, mais je ne suis pas sûr qu'il ait vraiment eu de religion. Il voyait autrement. D'une façon neuve, intérieure. »
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Ainsi parlait : Virginia Woolf ; dits et maximes de vie
Virginia Woolf
- Arfuyen
- Ainsi Parlait
- 30 Mai 2019
- 9782845902879
« Quelle vie doit-on mener ? La vie que l'on aime. J'aime écrire, j'aime le changement, j'aime lancer mon esprit dans les hauteurs et attendre de voir où il va retomber. » Virginia Woolf écrit ses lignes dans le monumental Journal qu'elle a commencé de rédiger lorsqu'elle avait 15 ans et qu'elle tiendra jusqu'à sa mort.
Et dans une lettre à Horace Walpole ce qu'elle écrit poursuit même interrogation : « Je pense parfois que seule l'autobiographie relève de la littérature ; les romans sont les pelures que nous ôtons pour arriver enfin au coeur qui est vous ou moi, rien d'autre. » C'est la vie qui intéresse Virginia Woolf, et rien d'autre. Qui l'effraie aussi : « La vie, pour les deux sexes est ardue, difficile, une lutte perpétuelle. Qui demande un courage et une force gigantesques. » Ces lignes, elle les écrit dans un recueil de conférences intitulé Une chambre à soi.
Dans ses journaux, lettres, essais, il n'est rien dont Virginia Woolf ne fasse l'objet de son écriture.
Car écrire, pour elle, c'est avant tout se libérer :
« Le premier devoir de la femme écrivain, c'est de tuer l'Ange du Foyer » (Journal). Il faut avoir lu, bien sûr, les géniaux romans de Virginia Woolf - Mrs Dalloway, Les Vagues etc. -, mais elle ne 'y trompait pas : c'est dans les écrits autobiogra- phiques que nous arrivons avec elle « au coeur » :
Ce « coeur qui est vous ou moi, rien d'autre ».
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Le livre de la vie monastique
Rainer Maria Rilke
- Arfuyen
- Les Carnets Spirituels
- 17 Octobre 2019
- 9782845902909
L'oeuvre de Rilke n'a cessé d'accompagner les éditions Arfuyen depuis leur création. De Rilke elles ont publié six ouvrages, souvent réédités : Le Vent du retour, trad. Claude Vigée (1989, rééd. 2005) ; La Vie de Marie, trad. Claire Lucques (1989, rééd. 1992 et 2013) ; L'Amour de Madeleine (1992, rééd. 2000 et 2015) ; Le Livre de la Pauvreté et de la Mort, trad.
Jacques Legrand (1997, rééd. 2016) ; « Donnez-nous des maîtres qui célèbrent l'Ici-Bas » (2006), enfin Ainsi parlait Rainer Maria Rilke, trad. Gérard Pfister (2018).
Le Livre de la vie monastique (Das Buch vom mönchischen Leben) a été écrit par en 1899 au retour de son premier voyage en Russie (avril-juin 1899) avec Lou Andreas-Salomé, à qui il est dédié.
Il constitue la première partie du Livre d'heures publié en 1905. Lou Andreas-Salomé en conservait le manuscrit original qui sera publié en fac-similé en 1936 : y figurent à côté des poèmes de précieux commentaires sur les lieux, les circonstances et l'état d'esprit dans lesquels ils ont été écrits par le « moine » réputé en être l'auteur. Ils sont reproduits ici pour la première fois avec les poèmes.
Écrit dans des circonstances exceptionnelles, ce texte est une des oeuvres les plus fortes, les plus « nietzschéennes » de Rilke, l'une de celle qu'Etty Hillesum gardait toujours avec elle. Peu et souvent très mal traduite en français (car très difficile à rendre), elle reste à découvrir par le public français.
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Après deux maîtres spirituels (Eckhart et Thérèse d'Avila), deux philosophes (Sénèque et Lulle) et un écrivain (Shakespeare), ce 6e ouvrage de la collection « Ainsi parlait » est consacré à un écrivain américain majeur. Emily Dickinson n'a rien publié de son vivant, mais les 1789 poèmes, 1049 lettres et 124 fragments publiés après sa mort constituent une oeuvre ample et inépuisable où est frappant le contraste entre une sensibilité d'écorchée vive et une intelligence puissamment libre et lucide.
T. W. Higginson, le seul à qui elle confia ses textes, fait à sa femme Mary un portrait fascinant de celle qu'il nomme « mon excentrique poétesse » : « un trottinement pareil à celui d'une enfant », « une femme petite et quelconque avec deux bandeaux lisses », « une voix douce, effrayée et haletante d'enfant », « disant bien des choses que tu aurais trouvées folles et moi sages. » « J'ai bien peur, écrit-il à ses soeurs, qu'une remarque de Mary : «Oh, pourquoi les fous s'attachent-ils tant à toi ?» ne soit vraie. » Folle ? Sage ? Bien plus :
Emily Dickinson est une visionnaire, qui parle d'un lieu qui n'est ni vie ni mort.
Une sibylle dont les paroles elliptiques livrent des vérités aussi foudroyantes que les fragments d'Héraclite auxquels elles font penser ou à ce Shakespeare qui, disait-elle, lui a « apporté plus de connaissances qu'aucun être vivant ».
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Villa Florida : Journaux 1918-1934
René Schickele
- Arfuyen
- Les Vies Imaginaires
- 9 Novembre 2023
- 9782845903487
Sur Schickele, il faut lire ce qu'écrivait Thomas Mann, Prix Nobel 1929 : « Schickele est Alsacien, il est né dans ce pays formant frontière, où depuis toujours les destinées de l'Europe ont balancé entre la France et l'Allemagne : voilà ce qui détermine l'allure et le ton de son oeuvre si riche et si pleine de charmes. ».
Dès 1931, Schickele est violemment attaqué par la presse nazie et doit s'exiler sur la Côte d'Azur, d'abord à Sanary, puis à Nice-Fabron, « Villa Florida » : « La maison est belle, au-delà de toute attente. [...] La nuit, j'ai le sentiment d'être sur un navire qui entame une longue croisière, au but inconnu. ».
Schickele partage cette « croisière » vers l'inconnu avec d'autres exilés célèbres, de Huxley et D.H. Lawrence à Thomas et Heinrich Mann. Schickele note au jour le jour les événements et ses rencontres et son journal a toute la vivacité de l'improvisation.
Au niveau littéraire, on y trouve d'admirables portraits, pris sur le vif, mais aussi, au début du livre, à la date du 5 janvier 1918, des descriptions émerveillées de la Riviera, des séquences pleines d'humour ou de nostalgie.
Au niveau historique, on y lit également, analysée au jour le jour, la montée comme inéluctable du populisme nazi, mais aussi une profonde réflexion sur l'identité allemande. Qu'est-ce que l'Allemagne ? se demande-t-il avec angoisse : « Vous et moi et mon frère [...], il faut qu'on dise un jour que c'est nous qui étions en ce temps - là l'Allemagne authentique. » -
Rimbaud cesse d'écrire avant trente ans, Trakl meurt à vingt-sept ans en 1914 et sa période dite de « maturité » n'aura également duré que quatre ans (1910-1914). Comme celui de Rimbaud, le parcours poétique de Trakl est menacé par la folie : « Aucun des sophismes de la folie, - la folie qu'on enferme - n'a été oublié par moi », écrit Rimbaud.
C'est cette même démence qui « enténèbre ».
L'oeuvre de Trakl. Mais alors que Rimbaud, prophète solaire et exalté, travaille à l'échelle de « l'immensité de l'univers » et de tous les hommes, Trakl, l'ermite nocturne, ne conçoit qu'une harmonie transmissible à quelques « séparés ».
L'hostilité de Trakl envers le classicisme bourgeois de Goethe contraste avec son admiration pour Novalis, qui apparaît comme son double bienheureux.
Mais, plus encore que Novalis, l'interlocuteur majeur de Trakl est Hölderlin, qui incarne la figure du « poète fou », devenu étranger à une réalité extérieure sans emprise sur lui.
Rilke disait avoir « beaucoup fréquenté, avec la plus grande émotion, la poésie de Georg Trakl » : les deux oeuvres se rencontrent autour de ce que Rilke nomme « le Terrible ». Mais le poème trakléen se différencie du poème rilkéen par son caractère apocalyptique, présage d'une destruction.
Paul Celan, héritier de Trakl s'il en est, parle à propos de sa propre oeuvre de « reste chantable ».
C'est bien en termes de « restes chantables » qu'on peut comprendre ce qui demeure chez Trakl de la tradition qu'il recueille et du monde qu'il affronte.
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Scènes d'une vie de bohème : une jeunesse à Colmar et Strasbourg (1880-1914)
Otto Flake
- Arfuyen
- Les Vies Imaginaires
- 6 Avril 2023
- 9782845903470
Paris, Berlin : deux capitales dont on sait l'intense créativité et la vie débridée dans les années 1900. Mais il est une autre ville qui en ces mêmes années joue un rôle majeur dans l'éclosion de la modernité : Strasbourg.
Dotée par le Kaiser d'institutions culturelles de premier ordre mais animée encore d'un fort tropisme pour la France, la capitale du Reichsland est en première ligne pour secouer les habitudes du vieux monde et inaugurer un art nouveau. Peintres, musiciens, écrivains, journalistes s'y mêlent. Cabarets, salons, revues y fleurissent.
À Strasbourg s'épanouit une véritable bohème.
Créée par Flake, Schichele et Stadler, la revue Der Stürmer est le porte-drapeau de cette extraordinaire « renaissance » : « Le cercle du Stürmer, se souvient Flake, s'est constitué à toute vitesse, de façon tout à fait explosive. [...] Tous les lieux où nous nous retrouvions prirent alors des allures de Quartier latin. ».
Flake est au soir de sa vie quand il écrit la chronique de ces années-là, avec une terrible nostalgie pour l'effervescence et la gaité de cette sorte de mai 68. « Je portais en moi, écrit-il, une révolte innée contre la subordination, les mots d'ordre collectifs, l'esprit associatif, la marche au pas de l'oie, les conventions, et je compris très jeune, dès mes dix ans, ce qui était en train de se former chez les fonctionnaires et les soldats, cet homme des masses des décennies à venir. » Une chronique unique par l'élégance et le brio de son style.
À la dernière phrase de son récit, Flake évoque le suicide de son ami Poppenberg en 1915 : « Lorsque la guerre éclata, il sut que l'ère du culte de la beauté touchait à sa fin, que celle de la barbarie commençait. ». -
Les révélations de l'amour divin
Julienne de Norwich
- Arfuyen
- Les Carnets Spirituels
- 6 Avril 2017
- 9782845902497
Le texte ici présenté est la traduction du texte court des Révélations de l'Amour divin (Revelations of Divine Love) de Julienne de Norwich. Ce texte court nous est parvenu dans un unique exemplaire conservé à la British Libra-ry de Londres. Probablement écrit peu de temps après sa maladie par la jeune Julienne de Norwich (et donc vers 1373), ce texte court rend compte avec force et simplicité des 16 révélations reçues tandis que le texte long, écrit et réécrit tout au long de sa vie, n'en est qu'une sage réélaboration. Premier chef d'oeuvre de la littérature anglaise, ce texte court est étonnam-ment très peu connu en France. Publié pour la première fois en 1976 par les éditions du Parvis (Suisse) dans une traduction de Roland Maisonneuve, il est depuis très longtemps introuvable dans notre langue.
« Un des plus beaux livres qui soit », disait Henri Bremond en parlant des Révélations. T. S. Eliot reprend dans ses Quatre Quatuors la parole reçue par Julienne de Norwich : « Je veux faire que tout soit bien, je ferai que tout soit bien, Je peux faire que tout soit bien, et Je sais faire que tout soit bien. Et tu verras par toi-même que tout sera bien », révélation qui est suivie de deux autres non moins réconfortantes : « Je te garde en pleine sécurité » et « Tu ne seras pas vaincue ». La spiritualité de Julienne est la vision d'un amour plus puissant que tout : que le péché, que la faiblesse, que la mort. Profondément joyeuse donc et qui suffit à illuminer une existence que Julienne vécut tout entière recluse dans un mur de l'église de Norwich.
Considérée par le cistercien Thomas Merton (1915-1968) comme « l'un des plus grands théologiens anglais », elle est une sainte pour l'Église anglicane.
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La petite chambre qui donnait sur la potence
Nathan Katz
- Arfuyen
- Les Vies Imaginaires
- 18 Juin 2020
- 9782845902978
C'est en juin 1915 que Nathan Katz est interné au camp de prisonniers de Nijni-Novgorod. Comme Etty Hillesum au camp de Westerbork, il écrit ce qu'il voit. Les paysages grandioses de la plaine russe en hiver. Mais aussi, sous forme de courtes nouvelles, des por-traits : un camarade de détention, une infirmière...
Cela aurait pu n'être que le témoignage d'un soldat prisonnier de guerre en Russie de juin 1915 à août 1916. Mais c'est le premier livre de Nathan Katz et il préfigure déjà toute son oeuvre. Autodidacte passionné de littérature, jeté dans la guerre et blessé à 21 ans, il passe tout le temps de sa captivité à une seule chose : travailler sur lui-même. Et ce travail est avant tout, comme le proclame le sous-titre du livre, Un combat pour la joie de vivre : « J'aimerais bien savoir, écrit-il, qui pourrait m'interdire de me sentir libre ici, dans un camp de prisonniers, entouré de hauts murs certes, mais où le soleil brille dans la cour. » Ne croirait-on pas lire le journal d'Etty Hillesum au camp de Westerbork ?
Écrit en langue allemande (l'Alsace était annexé au Reich depuis la défaite de 1870), Das Galgenstüblein raconte le devenir d'une conscience qui, jetée dans la mêlée d'une guerre, parvient à se former et à se dépasser en se hissant à l'universel. « Ce n'est sans doute pas un chef d'oeuvre littéraire, écrit Jean-Paul Sorg dans sa préface. C'est mieux que cela ! [...] C'est une confession singulière, à nulle autre pareille, qui prend place doucement - à pas de colombe - dans le champ de la littérature spirituelle mondiale, cent ans après sa première édition. »
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Alain Suied est mort le 24 juillet 2008. Il se savait condamné depuis plusieurs semaines et consacra ce temps à la méditation d'un poète qu'il aimait depuis toujours entre tous : John Keats.
Depuis l'hémorragie de février 1820, Keats lui aussi avait vécu sa dernière année comme une « vie posthume ». Et Keats lui aussi souffrait que ses poèmes ne rencontrent pas un accueil plus chaleureux et fera graver sur sa tombe l'épitaphe suivante : « Here lies one whose name was writ on water » (Ci-gît un dont la gloire fut écrite sur l'eau). Terrible répétition des choses à deux siècles de distance En 1990 avait paru aux Éditions Obsidiane la traduction de La Vigile de la Sainte-Agnès de Keats par Alain Suied, puis, en 1994, dans les Cahiers d'Arfuyen sa traduction des Odes, suivies de La Belle Dame sans Merci. Alain Suied avait souhaité que l'ensemble soit repris en un seul volume avec de nouveaux textes de présentation. Il avait eu le temps de relire le volume et ne cessa de l'enrichir des aperçus neufs que sa relecture passionnée des textes de Keats suscitait en lui durant sa propre maladie. La présente édition intègre ces dernier éléments.
Grâce à Alain Suied, nous pouvons lire Keats non plus comme « le grand poète anglais » mais comme notre contemporain : « En modernisant (à outrance ?) ma traduction, écrit Suied, je ne fais que suivre l'exemple et l'injonction du poète.? N'est-ce pas à travers ses choix si «subjectifs» (et tellement moqués à son époque !) qu'il a ouvert la voie à toute la Poésie moderne ? » C'est le privilège du grand traducteur de donner à relire les classiques autrement. C'est le cas d'Alain Suied avec Keats.
Lisons les premières lignes de sa préface des Odes : « «Puérile», «maladive», «vulgaire», «abstraite», «répétitive», «licencieuse», «insensée» : on ne saurait citer tous les qualificatifs qui accueillirent, au XIX° siècle, en Angleterre, la publication des poèmes de Keats. Cette oeuvre vouée à la beauté et au malheur du vivant, à la quête d'une allégorisation vivace de la brièveté et de la disparition d'une existence, à l'éloge d'Homère et de Dante et à la remise en question des conceptions poétiques de ses contemporains et désormais tenue pour la plus influente dans l'univers si riche et si varié de la poésie moderne de langue anglaise, fut l'objet des sarcasmes et des insultes de nombre de ses contemporains. » Parlant de Keats, il est évident que Suied parle aussi de lui-même. Si pudique, n'est-ce pas sa propre analyse qu'il nous livre en poussant la lecture de Keats dans les zones de l'inconscient ? « Quelque chose, écrit Suied, se cache derrière ce rejet presque unanime. Et si Keats, mort à 26 ans, avait à la lettre incarné la pensée (ou l'impensé) romantique? (...) Avec les Odes et avec la Vigile, quelque chose d'autre a lieu. (...) Loin du ''mâle'' byronien, hanté par la femme-soeur, Keats abolit le féminin par cette brisure même : répondre à l'Archaïsme, à la figure maternelle intériorisée, non par la célébration romantique, mais par l'identification qui annulera, apaisera l'infinie différence. (...) Le féminin n'est pas le ''faible'', le ''yin'', l'abandon - mais la lutte avec l'Archaïque, le jeu cruel et vital avec le naturel. Le mouvement des Odes est le mouvement même du Romantisme : le retour à la Mère, le refus de l'ordre socio-politique, de la révolution industrielle mais amené jusqu'à ses ultimes limites, jusqu'à ses fins dernières. »
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Nizar Kabbani est l'un des plus grands poètes arabes modernes et certainement le plus aimé.
Son rare esprit d'indépendance, son amour de la vie, son rejet des idéologies répressives l'expliquent largement. Comme aussi sa langue, simple, vive et directe.
Si le thème central de son oeuvre est la femme, il ne faut pas s'y tromper : à travers la femme, c'est de la liberté et de la vie qu'il parle, en son nom c'est l'archaïsme et le machisme de la société arabe qu'il dénonce.
D'où sa grande popularité, notamment à travers les interprétations de Fayrouz et Oum Kalsoum, mais aussi les vives réactions politiques que son oeuvre a suscitées. Nizar Kabbani a payé cher sa liberté : il a démissionné de son poste diplomatiqye en 1966 et s'est définitivement exilé durant les 18 dernières années e sa vie.
Les Éditions Arfuyen sont les seules à l'avoir publié de son vivant : en 1988 a paru un choix de ses poèmes en édition bilingue, Femmes, dans une traduction de Mohammed Oudaimah et avec une postface de Vénus Khoury-Ghata.
Pour ce livre il a lui-même réalisé la calligraphie de l'ensemble des poèmes.
Plus de trente après ce livre, devenu culte, reste le seul disponible en langue française. C'est cet ouvrage, paru dix ans avant sa mort, qui est ici réédité.
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Je t'écris de Bordeaux : blessures et refleurissements
Giuseppe Conte
- Arfuyen
- Neige
- 7 Avril 2022
- 9782845903265
Poète, romancier, essayiste, dramaturge, Conte est aujourd'hui l'une des plus grandes voix de la littérature italienne. Son oeuvre a été découverte en France grâce à deux traducteurs : Jean-Baptiste Para a traduit L'Océan et l'Enfant (1989) et deux autres recueils de poésie en 1994 et 2002 ;
Monique Baccelli a traduit deux romans en 2007 et 2008. Puis, étrangement, plus rien. C'est ainsi que l'un de ses plus grands recueils, Ferite e rifioriture, prix Viareggio 2006, n'a jamais été traduit ici.
Livre pourtant largement écrit en France (Bordeaux, Nice...) et marqué par la littérature française : le texte central est un long monologue imaginaire de Baudelaire à l'île Maurice en 1841 !
Mais surtout puissant livre symphonique, chant d'amour à la vie menacée : menacée sur la planète par la folie destructrice de l'homme comme, chez le poète, par la venue de l'âge. « Il n'est pas possible, déclarait Conte dans une interview, de dire «Il faut sauver la nature» si l'on ne change pas la perception même de la nature. La nature n'a pas de langage propre mais je pense qu'elle trouve un langage à travers nous. ».
C'est ce langage de la matière et du corps qui est au coeur du livre. Langage d'humilité et de tendresse, lucide et démuni : « Oh vie, je t'en prie / aie avec moi la main / légère. / Ne t'acharne pas contre qui t'a aimée / tant et sans raison, / comme doit aimer toujours celui qui aime. ».
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Johannes Scheffler, dit Angelus Silesius (1624-1677) est né à Breslau en Silésie (aujourd'hui Wroclaw) dans une famille luthérienne de petite noblesse. Selon l'usage de l'époque, ses études l'amènent à un tour d'Europe : inscrit en mai 1643 à l'Université de Strasbourg pour étudier la médecine, la politique et l'histoire, il arrive à Leyde en septembre 1644, et enfin à Padoue en 1647. Médecin de profession comme Paracelse, il se convertit au catholicisme en 1653 et entre dans l'ordre franciscain en 1661. La même année il devient prêtre. C'est en 1657, à mi-chemin de sa conversion et son entrée dans les ordres, que paraissent les poèmes du Cherubinischer Wandersmann. Réédités dans une version augmentée en 1675, deux ans avant sa mort, ces poèmes s'inscrivent dans la plus haute tradition mystique, étonnamment proches de Maître Eckhart même si marqués aussi par l'expérience ardente d'un Jakob Böhme. Leibniz range Silesius parmi ceux « dont les pensées extraordinairement audacieuses, remplies de comparaisons ardues ... confinent à l'impiété ». De fait, de Hegel à Heidegger en passant par Schopenhauer, l'écho de son oeuvre sur la pensée profane n'a cessé de s'amplifier : « Cette avancée téméraire, écrit Roger Munier, cette tension hardie vers les confins dans l'approche du mystère tant de Dieu que de l'homme, peut-être est-elle pour nous l'écho le plus juste, sinon l'appel le plus directement adressé d'une voix qui a retenti il y a plus de trois siècles ? » C'est dès la traduction du titre que Munier nous introduit à une nouvelle lecture. Car le mot Wandersmann n'a pas le sens premier de « pèlerin » (en allemand Pilger) : il évoque avant tout la marche, le cheminement, les voyages. Sans doute est-il « chérubinique » et pur, cet « homme en route », mais il n'est qu'un homme en route. Son aventure est celle de tout homme en quête et voué à l'errance, à cette marche extatique dans le temps qui fait de l'âme, selon l'expression même de Silesius, « la tente errante de Dieu » (IV, 219).