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Arts et spectacles
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De 1970 à 1987, Gilles Deleuze a donné un cours hebdomadaire à l'université expérimentale de Vincennes, puis de Saint-Denis à partir de 1980. Les huit séances de 1981 retranscrites et annotées dans le présent volume sont entièrement consacrées à la question de la peinture.
Quel rapport la peinture entretient-elle avec la catastrophe, avec le chaos ? Comment conjurer la grisaille et aborder la couleur ? Qu'est-ce qu'une ligne sans contour ? Qu'est-ce qu'un plan, un espace optique pur, un régime de couleur ?...
Cézanne, Van Gogh, Michel-Ange, Turner, Klee, Pollock, Mondrian, Bacon, Delacroix, Gauguin ou le Caravage sont pour Deleuze l'occasion de convoquer des concepts philosophiques importants : diagramme, code, digital et analogique, modulation. Avec ses étudiants, il renouvelle ces concepts qui bouleversent notre compréhension de l'activité créatrice des peintres. Concrète et joyeuse, la pensée de Deleuze est ici saisie au plus près de son mouvement propre. -
Cinéma Tome 1 : l'image-mouvement
Gilles Deleuze
- Éditions du Minuit
- Critique
- 1 Octobre 1983
- 9782707306593
Cette étude n'est pas une histoire du cinéma, mais un essai de classification des images et des signes tels qu'ils apparaissent au cinéma. On considère ici un premier type d'image, l'image-mouvement, avec ses variétés principales, image-perception, image-affection, image-action, et les signes (non linguistiques) qui les caractérisent. Tantôt la lumière entre en lutte avec les ténèbres, tantôt elle développe son rapport avec le blanc. Les qualités et les puissances tantôt s'expriment sur des visages, tantôt s'exposent dans des " espaces quelconques ", tantôt révèlent des mondes originaires, tantôt s'actualisent dans des milieux supposés réels. Les grands auteurs de cinéma inventent et composent des images et des signes, chacun à sa manière. Ils ne sont pas seulement confrontables à des peintres, des architectes, des musiciens mais à des penseurs. Il ne suffit pas de se plaindre ou de se féliciter de l'invasion de la pensée par l'audio-visuel ; il faut montrer comment la pensée opère avec les signes optiques et sonores de l'image-mouvement, et aussi d'une image-temps plus profonde, pour produire parfois de grandes oeuvres.
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L'architecture est un art ignoré. Par son texte et ses illustrations, l'ouvrage de Bruno Zevi constitue non seulement une indispensable histoire thématique de l'architecture depuis les Grecs jusqu'à Le Corbusier et Wright, mais encore et surtout une extraordinaire explication de cet art.
Qu'est-ce qui est de l'architecture ? Qu'est-ce qui n'en est pas ? L'intérêt capital de ce volume est de nous révéler cette notion d'espace, élément fondamental de l'architecture.
« Bruno Zevi est le critique le plus pénétrant et le plus sincère de notre temps. Il a la faculté de voir l'architecture, de la voir dans sa propre essence et d'exprimer ce qu'il voit en termes clairs et courageux. » Frank Lloyd Wright.
« Nul autre que Bruno Zevi n'est aussi qualifié pour réunir les meilleures formules de la vieille génération et la juvénile agressivité des nouveaux leaders. » Lewis Mumford.
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Un art moyen ; essai sur les usages sociaux de la photographie
Pierre Bourdieu
- Éditions du Minuit
- Le Sens Commun
- 1 Mars 1965
- 9782707300294
Alors que tout semble promettre la photographie, activité sans traditions et sans exigences, à l'anarchie de l'improvisation individuelle, rien n'est plus réglé et plus conventionnel que la pratique photographique et les photographies d'amateurs.
Les normes qui définissent les occasions et les objets de photographie révèlent la fonction sociale de l'acte et de l'image photographique éterniser et solenniser les temps forts de la vie collective. aussi la photographie, rite du culte domestique, par lequel on fabrique des images privées de la vie privée, est-elle une des rares activités qui puisse encore de nos jours enrichir la culture populaire : une esthétique peut s'y exprimer avec ses principes, ses canons et ses lois qui ne sont pas autre chose que l'expression dans le domaine esthétique d'attitudes éthiques.
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L'artiste est inventeur de temps. Il façonne, il donne chair à des durées jusqu'alors impossibles ou impensables : apories, fables chroniques.
Essayer voir, ce n'est pas seulement essayer de voir. C'est accorder son regard à la durée d'un " essai ", cette forme de pensée à la limite du théorique et du poétique. Forme que l'on retrouve dans Apple T., une oeuvre de Miroslaw Balka où se pose la question - déjà littérairement articulée par Aharon Appelfeld ou Imre Kertész - de savoir comment survivre à Treblinka. Forme que l'on retrouve aussi dans une oeuvre de James Coleman qui pose à son spectateur la question - déjà philosophiquement argumentée par Ludwig Wittgenstein et poétiquement phrasée par Samuel Beckett - de l'essayer dire, cette parole à trouver face à ce qui, sous nos yeux, se dérobe.
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Trois dialogues
Samuel Beckett
- Éditions du Minuit
- Roman Francais Minuit
- 1 Octobre 1998
- 9782707316400
Si Samuel Beckett assiste souvent aux discussions du groupe des artistes et des écrivains qui s'est formé, à Paris en 1947, autour de la revue de langue anglaise Transition que dirige Georges Duthuit, il n'aime guère y prendre directement part. C'est davantage dans une correspondance suivie, et au cours de conversations en tête à tête avec Georges Duthuit, qu'il se livre à un échange d'idées sur l'art en général et la peinture en particulier. En 1949, Samuel Beckett résume ces nombreux échanges et les transpose en trois dialogues imaginaires sur Tal-Coat, Masson et Bram van Velde.
Ce recueil est paru en 1998, traduit de l'anglais en partie par l'auteur, en partie par Edith Fournier.
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La perspective comme forme symbolique
Erwin Panofsky
- Éditions du Minuit
- Le Sens Commun
- 1 Janvier 1976
- 9782707300911
Les cinq essais réunis dans ce volume représentent la quasi-totalité des travaux que panofsky a publiés en allemand, avant 1932.
La volonté de fonder une science rigoureuse de l'oeuvre d'art qui s'exprime dans les recherches épistémologiques des débuts, et en particulier dans la critique de wölflin et de la notion de kunstwollen, s'affirme en acte dans ce chef-d'oeuvre de la science sociale qu'est la perspective comme forme symbolique. refusant de réduire la perspective à un simple problème technique ou mathématique, panofsky entend établir, à travers l'analyse de l'usage de la perspective angulaire dans l'antiquité, de l'ignorance quasi systématique de la perspective au moyen-age et de " l'invention " de la perspective plane par la renaissance, que le recours à la perspective s'appuie sur une philosophie de l'espace qui est elle-même solidaire d'une philosophie de la relation entre le sujet et le monde.
C'est ainsi que la philosophie idéaliste des " formes symboliques " se dépasse vers une histoire sociale des catégories de perception et de pensée.
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L'étoilement : conversation avec Hantaï
Georges Didi-Huberman
- Éditions du Minuit
- 18 Février 1998
- 9782707316301
L'artiste est inventeur de lieux.
Il façonne, il donne chair à des espaces jusqu'alors impossibles ou impensables : apories, fables topiques.
Le genre de lieux qu'invente simon hantaï passe d'abord par un travail avec la toile : matériau tactile, outil d'empreintes et de modulations plutôt qu'écran de projection, support, voire l'organisme vivant du "pliage comme méthode", cette procédure que le peintre a développée jusqu'à ses limites extrêmes.
La "toile au travail" est ici présentée comme une fable d'objets textiles - le filet, la maille, le tablier, la faille, la serpillière, le linceul, etc. - oú se raconte l'accouchement du tableau, son entoilement, jusqu'à l'étoilement généralisé qu'impose à nos regards la peinture de hantaï.
Pour cette conversation, le peintre sort d'une longue réserve. ses mots eux-mêmes sont autant de noeuds ou d'étoilements dans le tissu de notre pensée sur l'art.
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Devant le temps : histoire de l'art et anachronisme des images
Georges Didi-Huberman
- Éditions du Minuit
- Critique
- 5 Octobre 2000
- 9782707317261
Mettre le temps au centre de toute pensée de l'image : nous sommes devant l'image comme devant du temps - car dans l'image c'est bien du temps qui nous regarde.
Quel genre de temps ? Durée ou instantanéité ? Continuité ou discontinuité ? Écoulement ou écroulement ? Généalogie ou nouveauté ? Les questions sont multiples. Ce livre tente de les reformuler, dans toute l'ampleur des débats qui conditionnent, aujourd'hui encore, notre approche des images : depuis l'antique fondation d'une histoire de l'art chez Pline l'Ancien jusqu'aux plus récents débats sur l'art contemporain.
Au coeur de ces dilemmes surgit une position dialectique qu'incarnent spécialement quelques penseurs non académiques des années vingt et trente, spécialement Walter Benjamin et Carl Einstein. Leur travail théorique est ici relu comme une pensée de l'anachronisme : les images ne sont ni les purs fétiches intemporels que prône l'esthétique classique, ni les simples chroniques figuratives que prône l'histoire de l'art positiviste. Elles sont des montages de temporalités différentes, des symptômes déchirant le cours normal des choses. Quand l'image survient, l'histoire se « démonte », dans tous les sens du mot. Mais alors, le temps se montre, il s'ouvre dans toute sa complexité, dans son montage de rythmes hétérogènes formant anachronismes.
Façon de repenser, dans l'image, les rapports de notre Maintenant avec l'Autrefois. Façon de critiquer une certaine conception de l'histoire en proposant, via l'anachronisme - cette part maudite de l'historien - un nouveau modèle de temporalité. Façon de mettre l'image au centre de toute pensée du temps.
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L'oeil de l'histoire Tome 5 ; passés cités par JLG
Georges Didi-Huberman
- Éditions du Minuit
- Paradoxe
- 12 Mars 2015
- 9782707328489
Jean-Luc Godard, comme penseur aussi bien que comme cinéaste - dans ses films tissés de phrases autant que d'images - semble s'être donné pour tâche de voir le temps. Il a l'oeil sur l'histoire. Il s'inquiète souvent de la cécité de ses contemporains. Il leur répond par d'inlassables et d'inclassables citations dans lesquelles, pour ainsi dire, le passé est « cité à comparaître ». C'est comme un tribunal qu'il met en place. Mais où Godard se tient-il lui-même dans ce tribunal de l'histoire ? Tour à tour dans le fauteuil du juge, dans celui du procureur, du greffier, de l'avocat et, pour finir, sur le banc des accusés.
Ce livre voudrait interroger les diverses façons dont Godard fait de l'histoire avec les images. Comment fait-il pour « confondre » l'histoire, ainsi qu'il aime dire ? (Mais « confondre », qu'est-ce que cela veut dire au juste ? Confondre les coupables ou bien s'arranger pour tout confondre ?). Comment procède-t-il pour la juger, cette histoire, ainsi qu'il le fait si souvent ? Godard a diverses manières : divers jeux de langage qui, quelquefois, se contredisent entre eux. Divers arts du montage où apparaissent, ici son lyrisme ouvert (Rimbaud) et là ses slogans fermés (Mao), ici sa radicalité et là ses ambiguïtés. Il y a donc plusieurs JLG : un JLG de l'autorité (qui admire Malraux) et un JLG de la poéticité (qui admire les romantiques allemands). D'autres encore. Comme ce JLG qui polémique avec Pasolini et cet autre qui veut lui tendre la main.
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Au cours du second semestre 1976, jean dubuffet eut de nombreuses conversations sur son travail avec marcel péju, lequel en établit ensuite une transcription.
Mais jean dubuffet s'opposa à sa publication : dans son esprit, il s'agissait seulement d'une ébauche en vue de la préparation d'entretiens plus élaborés. cependant, il autorisa en 1980 jacques berne à mettre ces textes au net et, quelques mois plus tard, il s'en inspira pour rédiger lui-même une série d'entretiens fictifs. ce sont ces pages, regroupées à l'origine sous le titre questionnaire à bâtons rompus qui constituent les cent quatre premiers numéros du présent volume.
A la mort de jean dubuffet, en mai 1985, on trouva le manuscrit sur sa table, pourvu du titre, abrégé, de bâtons rompus et augmenté, selon sa propre expression, d'un "train de rallonge", rédigé en mai 1983 et en avril 1984.
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écoute, une histoire de nos oreilles
Peter Szendy
- Éditions du Minuit
- Paradoxe
- 30 Décembre 2000
- 9782707317315
L'écoute est peut-être l'activité la plus discrète qui soit. C'est à peine une activité : une passivité, dit-on, une manière d'être affecté qui semble vouée à passer inaperçue. Quelqu'un qui écoute, ça ne s'entend pas.
J'ai pourtant rêvé d'une archéologie de nos écoutes musicales : une histoire de nos oreilles de mélomanes, de maniaques de mélodies en tout genre.
J'ai voulu savoir d'où elles me venaient, ces oreilles que je porte et que je prête. Quel était leur âge ? Que devais-je, que pouvais-je faire avec elles ? De qui les tenais-je, à qui en étais-je redevable ?
J'ai donc traqué tous les indices possibles.
Il y a une criminologie de l'écoute (des auditeurs se retrouvent au tribunal, accusés ou plaignants). Il y a des écritures de l'écoute (certaines oreilles laissent des traces durables de leur passage). Il y a des instruments d'écoute (des prothèses enregistreuses, des machines à entendre). Enfin, il y a une polémologie de l'écoute, avec ses guerres, ses stratégies organisées ; bref, tout un champ de bataille où nos oreilles, plastiquement, se conforment à des lois et gardent, tel Don Juan face au Commandeur, l'empreinte de l'écoute de l'autre.
Et puis, il y a toi. Toi à qui mes écoutes sont adressées. Toi qui parfois, c'est si rare, m'écoutes écouter. (P. Sz.) Écoute est paru en 2001.
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L'artiste est inventeur de temps. Il façonne, il donne chair à des durées jusqu'alors impossibles ou impensables : apories, fables chroniques.
En ce sens pourrait-on dire qu'il " sent le grisou " de l'histoire. Mais comment sentir le grisou, ce gaz incolore et inodore ? Comment voir venir le temps ? Les mineurs, autrefois, utilisaient des oisillons en cage comme " devins " pour les coups de grisou : mauvais augure quand le plumage frémissait. Le frémissement des images ne pourrait-il pas, lui aussi, remplir cet office mystérieux ? C'est ce qu'on tente ici de suggérer à travers un libre commentaire de quelques images " remontées du fond de la mine " mais, surtout, de La rabbia, l'admirable film d'archives politico-poétique de Pier Paolo Pasolini.
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L'artiste est inventeur de temps. Il façonne, il donne chair à des durées jusqu'alors impossibles ou impensables : apories, fables chroniques.
Le Temps scellé, une sculpture de Pascal Convert, a fait partie d'une grande exposition ayant le chef-d'oeuvre pour thème. On s'interroge sur les tensions qui surgissent alors entre l'autorité de l'oeuvre (créatrice de valeur) et l'inestimable modestie du travail (qui comporte, chez Convert, un aspect archivistique et historien). On s'interroge aussi sur les tensions inhérentes à Queen and Country, une oeuvre de Steve McQueen sur la guerre d'Irak, et où se révèle la position sur le fil de l'artiste dans le monde politique. Histoire de relire aussi les phrases de Jean Genet sur le funambule, cet être qui danse avec le temps qui le tuera pour sûr.
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L'artiste est inventeur de temps. Il façonne, il donne chair à des durées jusqu'alors impossibles ou impensables : apories, fables chroniques.
Un petit film de Sarkis intitulé Au commencement, l'apparition donne ici l'occasion de réfléchir ? historiquement et anthropologiquement ? sur l'étrange figure composée du lait et de la mort. Entre l'écoute et la parole, une installation d'Esther Shalev-Gerz, permet quant à elle de reposer à nouveaux frais la question du témoignage historique et de ses « blancs », de ses événements de silence. Question qui ne peut être traitée de haut puisqu'elle met en cause notre langage lui-même, et qui cherche son propre phrasé à l'écoute de la littérature, qu'il s'agisse d'un poème de Mallarmé, d'une fable hassidique ou d'un récit de Georges Perec.
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Six leçons sur le son et le sens
Roman Jakobson
- Éditions du Minuit
- Arguments
- 1 Octobre 1976
- 9782707301185
Les " six leçons sur le son et le sens " furent données en 1942 par roman jakobson à l'ecole libre des hautes études, que des savants français et belges exilés venaient de fonder à new york.
Ces cours furent suivis, entre autres, par des professeurs de l'ecole comme henri grégoire, jacques hadamard et claude lévi-strauss, ainsi que par des linguistes comme j. mattoso câmara, paul l. garvin, charles f. hockett, henry m. hoenigswald et thomas a. sebeok. n'ayant pas à l'époque l'habitude de parler français en public, roman jakobson avait rédigé d'avance des notes très complètes, inédites à ce jour, et qui n'ont subi, dans la présente édition, que de légères modifications de forme.
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Ce que l'art fait à la sociologie
Nathalie Heinich
- Éditions du Minuit
- Paradoxe
- 14 Octobre 1998
- 9782707316547
L'art est un objet critique de la sociologie : parce qu'il est investi des valeurs mêmes - singularité et universalité contre lesquelles s'est construite la tradition sociologique, il incite, plus que tout autre domaine, à opérer des déplacements qui affectent non seulement la sociologie de l'art, mais l'exercice de la sociologie en général.
Il est donc temps d'observer non plus ce que la sociologie fait à l'art, mais ce que l'art peut faire à la sociologie dès lors qu'on prend au sérieux la façon dont il est perçu par les acteurs, ainsi se redistribuent les approches méthodologiques et théoriques, permettant de revenir sur des habitudes mentales ancrées dans une tradition sociologique qui n'est encore le plus souvent qu'une idéologie du social - une socio-idéologie.
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Le triple jeu de l'art contemporain
Nathalie Heinich
- Éditions du Minuit
- Paradoxe
- 20 Janvier 1998
- 9782707316233
Depuis le début du siècle, et plus radicalement depuis les années cinquante, les avant-gardes artistiques réitèrent sous différents angles l'opération qui consiste à transgresser une frontière et, en la transgressant, à la donner à voir frontières de l'art lui-même tel que le définit le sens commun (beauté, expressivité, signification, pérennité, exposabilité, et jusqu'aux matériaux traditionnels que sont la peinture sur toile et la sculpture sur socle), frontières matérielles du musée, frontières mentales de l'authenticité, frontières éthiques de la morale et du droit. Ainsi s'est constitué un nouveau « genre » de l'art, occupant une position homologue de celle de la « peinture d'histoire » à l'âge classique.
À cette déconstruction des principes canoniques définissant traditionnellement l'oeuvre d'art, les différentes catégories de publics tendent bien sûr à réagir négativement, en réaffirmant - parfois violemment - les valeurs ainsi transgressées. Mais peu à peu, les médiateurs spécialisés (critiques d'art, galeristes, collectionneurs, responsables institutionnels) intègrent ces transgressions en élargissant les frontières de l'art, provoquant ainsi de nouvelles réactions - et de nouvelles transgressions toujours plus radicales, obligeant les institutions à toujours plus de permissivité, et instaurant une coupure toujours plus prononcée entre initiés et profanes.
C'est là le jeu à trois partenaires, ce « triple jeu » qui donne sens aux étranges avatars des avant-gardes actuelles. Pour le comprendre, il faut donc s'intéresser non seulement aux propositions des artistes (peintures et sculptures, installations et assemblages, performances et happenings, interventions in situ et vidéos), mais aussi aux réactions auxquelles elles donnent lieu (gestes, paroles, écrits) et aux instruments de leur intégration à la catégorie des oeuvres d'art (murs des musées et des galeries, argent et nom des institutions, pages des revues, paroles et écrits des spécialistes). Aussi faut-il associer ces trois approches trop compartimentées que sont la sociologie des oeuvres, la sociologie de la réception et la sociologie de la médiation. C'est ce que propose ce livre, empruntant aux tendances les plus récentes des sciences sociales, à partir d'une analyse esthétique des oeuvres d'art contemporain, ainsi que d'enquêtes auprès des publics, d'observations de terrain, de statistiques et d'analyses de textes. Dans l'atmosphère de lutte de clans qui entoure aujourd'hui l'art contemporain, partisans et opposants se demanderont sans doute de quel bord est issue cette réflexion. Elle a toutes chances de conforter et d'agacer les uns comme les autres : elle agacera ses adversaires en confortant ses défenseurs, parce qu'elle montre que les pratiques artistiques les plus déroutantes obéissent à une logique, ne sont pas « n'importe quoi » ; et elle confortera ses adversaires en agaçant ses défenseurs, parce que la logique qu'on y découvre n'est pas forcément du même ordre que celle qu'y voient spécialistes ou amateurs. Mais il ne s'agit plus ici de prendre parti dans les querelles virulentes à propos de l'art contemporain : il s'agit de prendre pour objet (entre autres) ces querelles, en mettant en évidence ce qui les sous-tend - pour le plaisir de comprendre non seulement le jeu de l'art contemporain, mais aussi les valeurs dont il joue, et qui concernent tout un chacun.
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L'invention d'un tableau ; «le tempête» de giorgione
Settis S
- Éditions du Minuit
- Le Sens Commun
- 1 Octobre 1987
- 9782707311320
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L'urbanisme des trois etablissements humains
Le Corbusier
- Éditions du Minuit
- 1 Octobre 1959
- 9782707304285
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Le cinéma ou l'homme imaginaire ; essai d'anthropologie
Edgar Morin
- Éditions du Minuit
- Arguments
- 1 Avril 1958
- 9782707302106
L'art du cinéma, l'industrie du film ne sont que les parties émergées à notre conscience d'un phénomène qu'il nous faut essayer de saisir dans sa plénitude. Mais la partie immergée, cette évidence obscure, se confond avec notre propre substance humaine, elle-même évidente et obscure, comme le battement de notre coeur, les passions de notre âme. Avec le cinéma nous entrons dans les ténèbres d'une grotte artificielle. Une poussière lumineuse se projette et danse sur un écran ; nos regards s'y abreuvent ; elle prend corps et vie ; elle nous entraîne dans une aventure errante : nous franchissons les temps et les espaces, jusqu'à ce qu'une musique solennelle dissolve les ombres sur la toile redevenue blanche. Nous sortons, et nous parlons des qualités et des défauts d'un film. Interroger le cinéma, l'envisager dans sa totalité humaine, tel est le dessein du présent ouvrage.
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Du peintre à l'artiste : Artisans et académiciens à l'âge classique
Nathalie Heinich
- Éditions du Minuit
- Paradoxe
- 23 Février 1999
- 9782707314543
En 1648 fut fondée à Paris l'Académie royale de peinture et de sculpture : innovation radicale dans le monde des « imagiers », puisque c'était revendiquer l'accès à un statut traditionnellement réservé aux « arts libéraux » dont peinture et sculpture n'avaient jamais fait partie. Car il fut un temps, pas si lointain, où les notions d'art et d'artiste n'avaient pas cours au sens où nous les entendons ; où peintres et sculpteurs étaient des artisans, semblables à tous les travailleurs manuels qui produisaient et vendaient eux-mêmes leurs ouvrages, cordonniers ou boulangers, chapeliers ou vitriers ; et où former une académie représentait un privilège qui, parce qu'il outrepassait la coutume et le droit, dût être conquis de haute lutte.
Pour comprendre le passage de l'artisanat aux beaux-arts et du peintre à l'artiste, il faut chercher les raisons de cette « académisation » des arts du dessin à l'âge classique : pourquoi ne sont-ils pas demeurés des métiers artisanaux exercés dans un quasi-anonymat, et pourquoi cela advint-il aux arts de l'image plutôt qu'à n'importe quelle autre activité manuelle ? Et il faut en dégager les effets sur leur pratique et sur leur perception : comment se transforma la hiérarchie des peintres, et leur rapport au talent, à l'argent, aux clients, à leur nom même et à leur propre image' ? Comment évolua le regard sur la peinture, et comment s'imposèrent peu à peu les termes de « beaux-arts » et d'« artiste », jusqu'alors inconnus ? Ce sont les questions auxquelles répond cet ouvrage, en retraçant la formulation en France de l'identité d'artiste. du milieu du XVIIe à la fin du XVIIIe siècle, en cette période où triompha, de sa mise en place aux prémices de sa mise en pièces, le régime académique.