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Tahsin Yücel
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Court roman de moeurs qui éclaire l'histoire et les contradictions de la Turquie d'hier et d'aujourd'hui, "Un grand Seigneur" est le théâtre d'une blessure amoureuse dont la victime 30 ans après ne peut faire le deuil. A moins qu'il ne s'agisse d'une offense, celle que lui fit le père de sa bien-aimée en refusant de lui donner sa fille en mariage sans s'expliquer sur ses motivations... Un roman éminemment stendhalien en 80 pages.
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Ce roman est une parabole sur l'évolution irrésistible de la vie économique, la privatisation des institutions et l'américanisation de la ville d'Istanbul, un livre où l'ironie du narrateur permet de démasquer les faux-semblants de la société turque, de se désoler de l'effritement de la laïcité ou du pouvoir des médias.
Fiction se déroulant en 2073, Le Gratte-ciel évoque une ville futuriste où la lutte pour les espaces à bâtir est féroce et où les pauvres sont rejetés en dehors de la cité et cela jusqu'à leur révolte finale.
Très inattendue et originale dans le cadre turc, cette utopie négative intègre donc l'extension gigantesque d'Istanbul et les dérives du libéralisme vues par un écrivain, grand fabuliste né en 1933. Sur un ton très acide, il offre une vision grotesque et terrifiante de l'avenir, notamment à travers les échanges entre un architecte et son ami juriste qui s'apprêtent à faire d'Istanbul un second New York où une nouvelle statue de la liberté pourrait être érigée face au Palais de Topkapi...
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Ce roman raconte l'histoire de Cumali et de sa moustache. De retour du service militaire, et dans un premier temps très occupé, le jeune homme ne se rase plus. Quand enfin il s'installe sur le fauteuil du barbier Ziya, personnage haut en couleur et très renommé, ce dernier décide de lui raser la barbe mais de préserver la moustache, et, mieux encore, de faire de cet attribut esthétique son grand oeuvre. Le travail achevé, Cumali est superbe et le barbier satisfait. Mais la moustache est si belle que Ziya va inciter le jeune notable à vivre dans l'ombre de sa nouvelle apparence. Au-dessus de ses lèvres s'est en effet installé un incroyable double crochet qui deviendra bientôt, aux yeux des villageois, rien de moins que la réincarnation de la gloire passée et à venir du pays tout entier.
Une fable philosophique toute en finesse que l'on pourrait considérer comme une forme de regard direct sur les choses. Comment, s'interroge Tashin Yücel, rendre compte de la folie qui agite le monde sans pour autant l'empêcher de tourner ?
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Deux heures plus tard, alors que l'autocar tournait le dos à la mer et s'éloignait, un faisceau de questions étranges tournait dans son cerveau comme la chanson de Ayten Hanim : est-ce la dispute qui conférait une beauté et un sens à l'existence, la vie était-elle trop belle par rapport à la dispute, ou encore tout était-il contenu dans l'acte qui, hier soir, avait commencé par un accrochage ? ' Je n'en ai pas la moindre idée ', murmura-t-il.
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Un petit employé de bureau, Saban Bas, mal dans sa peau, effacé, longe les murs et se méfie de tout le monde : des fois qu'il ait affaire à un flic. Une paranoïa relationnelle confine ici au chef-d'oeuvre narratif. Cependant, en lui, un autre personnage est aux aguets et résiste à cet écrasement : le héros caché de Saban Bas devient alors Volkan Tas, un être sûr de lui, beau et fort. Saban Bas, envahi par des sentiments de honte, notamment lorsqu'il trompe sa fiancée avec sa vieille logeuse qui sent l'oignon, ne trouve qu'un seul refuge : les lieux d'aisance publics. Dès lors, une schizophrénie littéraire s'installe et débouche sur la réconciliation identitaire des deux personnages. L'écriture commence par des balbutiements pour devenir ensuite un moyen d'expression où se révèle le mépris du narrateur à l'endroit des écrivains et des politiciens de son pays, et finalement se transformer en un véritable art. A travers une métaphore de la condition littéraire contemporaine, le roman symbolise une déchéance, un rejet de la littérature dont le narrateur est l'acteur emblématique. Le ton du livre, à la fois sentencieux et familier, sérieux et comique renforce l'intensité de la dualité qui habite le personnage. Les enchaînements se font par associations d'idées, de façon très naturelle si bien qu'on ne perd jamais le fil tout en étant " baladé " d'un sujet à l'autre. Ce texte court, concentré, pratique une économie de la phrase la rendant d'autant plus explosive. Dialogue sous forme de monologue, l'oeuvre mélange le présent et les souvenirs d'enfance, des anecdotes et des observations sur la littérature qu'accompagne un oeil goguenard lorsqu'il épie avec acuité les travers de l'espèce humaine.