Des vertus, on ne parle plus guère.
Cela ne signifie pas que nous n'en ayons plus besoin, ni ne nous autorise à y renoncer. mieux vaut enseigner les vertus, disait spinoza, que condamner les vices : mieux vaut la joie que la tristesse, mieux vaut l'admiration que le mépris, mieux vaut l'exemple que la honte.
Il ne s'agit pas de donner des leçons de morale, mais d'aider chacun à devenir son propre maître, comme il convient, et son unique juge.
Dans quel but ? pour être plus humain, plus fort, plus doux. vertu c'est puissance, c'est excellence, c'est exigence. les vertus sont nos valeurs morales, mais incarnées, autant que nous le pouvons, mais vécues, mais en acte : toujours singulières, comme chacun d'entre nous, toujours plurielles, comme les faiblesses qu'elles combattent ou redressent. il n'y a pas de bien en soi : le bien n'existe pas, il est à faire et c'est ce qu'on appelle les vertus.
Ce sont elles que je me suis données ici pour objet : de la politesse à l'amour, dix-huit chapitres sur ces vertus qui nous manquent (mais point totalement : comment pourrions-nous autrement les penser ?), et qui nous éclairent.
« Philosopher, c'est penser sa vie et vivre sa pensée. Entre les deux, un décalage subsiste pourtant, qui nous constitue et nous déchire. A quoi bon tant penser si c'est pour vivre si peu ? On voudrait ici essayer autre chose : une philosophie à découvert, au plus près de la vie réelle, de ses échecs, de sa fragilité, de sa perpétuelle et fugitive improvisation. C'est ce que le mot d'impromptus, emprunté à Schubert, a paru pouvoir désigner à peu près. »
« J'aime les définitions. J'y vois davantage qu'un jeu ou qu'un exercice intellectuel?: une exigence de la pensée. Pour ne pas se perdre dans la forêt des mots et des idées. Pour trouver son chemin, toujours singulier, vers l'universel.
La philosophie a son vocabulaire propre?: certains mots qui n'appartiennent qu'à elle, d'autres, plus nombreux, qu'elle emprunte au langage ordinaire, auxquels elle donne un sens plus précis ou plus profond. Cela fait une partie de sa difficulté comme de sa force. Un jargon?? Seulement pour ceux qui ne le connaissent pas ou qui s'en servent mal. Voltaire, à qui j'emprunte mon titre, a su montrer que la clarté, contre la folie des hommes, était plus efficace qu'un discours sibyllin ou abscons. Comment combattre l'obscurantisme par l'obscurité?? La peur, par le terrorisme?? La bêtise, par le snobisme?? Mieux vaut s'adresser à tous, pour aider chacun à penser. La philosophie n'appartient à personne. Qu'elle demande des efforts, du travail, de la réflexion, c'est une évidence. Mais elle ne vaut que par le plaisir qu'elle offre?: celui de penser mieux, pour vivre mieux. C'est à quoi ces 2 267 définitions voudraient contribuer. »
Ce texte, André Comte-Sponville l'a conçu quand il avait 26 ans. L'oeuvre est une méditation de jeunesse. Elle se présente à bien des égards comme un exercice d'admiration (Montaigne et Pascal, Épicure et Lucrèce, Spinoza et Descartes, Marx et Freud...) mais relève aussi d'une déprise radicale d'avec la modernité littéraire et intellectuelle (Foucault, Deleuze, Barthes, Derrida...). Une douzaine de sections aborde quelques grands thèmes philosophiques, l'art, la liberté, la vérité, la religion..., dans un style libre et concis, proche de l'aphorisme qui fascinait déjà le jeune écrivain. Vingthuit ans plus tard, au moment de publier ce texte de jeunesse, l'auteur a à peine révisé son manuscrit. Il lui reconnaît un caractère certes juvénile et imparfait mais en endosse la paternité avec le regard mûr de l'homme accompli. « Il faut savoir penser contre son temps » : telle était déjà la ligne de conduite que s'était fixé l'écrivain.
« Nous sommes prisonniers de l'avenir et de nos rêves : à force d'attendre des lendemains qui chantent, nous perdons la seule vie réelle, qui est d'aujourd'hui.
«Ainsi nous ne vivons jamais, disait Pascal, nous espérons de vivre...» C'est le piège des religions, avec ou sans Dieu : l'espoir est l'opium du peuple.
Pourtant il faut vivre et lutter : monter «à l'assaut du ciel», même si ce ciel n'existe pas. Tel est le défi aujourd'hui du matérialisme philosophique, tel qu'Icare a paru pouvoir le symboliser. Matérialisme ascendant, donc. Il s'agit d'être athée sans être indigne. Il nous faut pour cela inventer - ou réinventer - une sagesse sans mystification ni lâcheté : une sagesse du désespoir. Ici, maintenant :
Une sagesse pour notre temps. »
« Ce recueil d'impromptus obéit aux mêmes principes que le précédent, Impromptus, publié chez le même éditeur, il y a une vingtaine d'années : il s'agit toujours de textes brefs, écrits sur le champ et sans préparation, entre philosophie et littérature, entre pensée et mélancolie, sous la double invocation de Schubert, qui donna au genre ses lettres de noblesse musicale, et de Montaigne, philosophe «imprémédité et fortuit». Je m'y suis interdit toute technicité, toute érudition, toute systématisation.
Ces douze textes, dans leur disparate, dans leur subjectivité, dans ce qu'ils ont de fragile et d'incertain, visent moins à exposer une doctrine qu'à marquer les étapes d'un cheminement. Un impromptu est un essai, au sens montanien du terme, donc le contraire d'un traité. Si vous n'aimez pas ça, n'en dégoûtez pas les autres. » André Comte-Sponville
André Comte-Sponville livre ici vingt-six études d'histoire de la philosophie, portant principalement sur les traditions tragique et matérialiste, depuis l'Ecclésiaste jusqu'à Marcel Conche, en passant par Montaigne, Pascal, La Rochefoucauld, Spinoza, La Mettrie, Jean-Marie Guyau, Nietzsche et Alain.
La préface propose une longue analyse de la notion de tragique. L'auteur y prend au sérieux ce que la littérature et la vie nous apprennent : que le tragique a à voir avec le malheur, mais réel plutôt que possible (par différence avec le « suspense ») et nécessaire plutôt que contingent (par différence avec le drame). Loin d'être l'affirmation joyeuse de tout, comme le voulait Nietzsche, le tragique est plutôt la prise en compte inconsolée de ce qu'il y a de catastrophique dans la condition humaine : la mort, la solitude, l'insatisfaction - trois formes de la finitude, qui ne sont tragiques que par la conscience, en l'homme, d'un infini au moins pensable.
La conclusion, elle aussi fort développée, montre que le matérialisme, s'il est rigoureux, se doit d'être une pensée tragique, c'est-à-dire aporétique, déceptive, inconsolée. Et qu'une sagesse qui se sait insuffisante et insatisfaite (une sagesse tragique) vaut mieux, de ce point de vue, que la suffisance d'une sagesse prétendument satisfaite. Cela amène à prendre quelque distance avec Épicure, Spinoza, Nietzsche et Marx. Et à se trouver plus proche de Lucrèce, de Montaigne ou du dernier Althusser.
Cet ouvrage constitue un recueil d'articles d'histoire de la philosophie, portant principalement sur les deux traditions tragique et matérialiste, donc aussi sur leur rapport, lequel est analysé dans une longue préface et une longue conclusion, l'une et l'autre inédites et très personnelles : André Comte-Sponville y fait le point sur sa propre évolution philosophique, depuis son adolescence jusqu'à aujourd'hui.
Philosopher, c'est penser sa vie et vivre sa pensée.
Entre les deux un décalage subsiste pourtant, qui nous constitue et nous déchire. c'est de quoi la philosophie, souvent, n'est que la dénégation. a quoi bon tant penser, si c'est pour vivre si peu ? la paranoïa, disait freud, est " un système philosophique déformé " ; et un système philosophique, ajouterais-je volontiers, est une paranoïa réussie.
On voudrait ici essayer autre chose - autre chose que cette paranoïa des systèmes, autre chose, même, que cette réussite : une philosophie à découvert, au plus près de la vie réelle, de ses échecs, de sa fragilité, de sa perpétuelle et fugitive improvisation.
C'est que le mot d'impromptus, emprunté à schubert, a paru pouvoir désigner à peu près.
André comte-sponville.
On parle d'éducation sentimentale ; pourquoi ne parlerait-on, un peu au même sens, d'éducation philosophique ? l'esprit, non moins que le coeur, a son apprentissage, ses passions, ses égarements ou ses fidélités.
L'esprit, c'est la mémoire. non que penser soit se souvenir, comme le voulait platon ; mais parce qu'une pensée oublieuse, comme est la science, est une pensée sans esprit ou sans âme.
Ces quelques textes, divers quant à leur objet, ont en commun ce souci d'un passé : celui de l'auteur, celui des traditions qui l'inspirent, celui des maîtres qui l'ont formé ou qui le guident. l'esprit n'est pas une chose, c'est une histoire, et fidélité à cette histoire.
Pour les individus comme pour les peuples, le passé de l'esprit, c'est l'esprit même.
" cela fait beaucoup de passé, dira-t-on, pour un homme jeune, et beaucoup d'esprit pour un matérialiste. " mais c'est quand on est jeune qu'il faut cultiver la fidélité ; et quand on est matérialiste, qu'il faut sauver l'esprit.
C'est à peu près ce que ce livre raconte ou essaie d'expliquer.
A. c-s.
André Comte-Sponville livre ici vingt-six études d'histoire de la philosophie, portant principalement sur les traditions tragique et matérialiste, depuis l'Ecclésiaste jusqu'à Marcel Conche, en passant par Montaigne, Pascal, La Rochefoucauld, Spinoza, La Mettrie, Jean-Marie Guyau, Nietzsche et Alain.
La préface propose une longue analyse de la notion de tragique. L'auteur y prend au sérieux ce que la littérature et la vie nous apprennent : que le tragique a à voir avec le malheur, mais réel plutôt que possible (par différence avec le « suspense ») et nécessaire plutôt que contingent (par différence avec le drame). Loin d'être l'affirmation joyeuse de tout, comme le voulait Nietzsche, le tragique est plutôt la prise en compte inconsolée de ce qu'il y a de catastrophique dans la condition humaine : la mort, la solitude, l'insatisfaction - trois formes de la finitude, qui ne sont tragiques que par la conscience, en l'homme, d'un infini au moins pensable.
La conclusion, elle aussi fort développée, montre que le matérialisme, s'il est rigoureux, se doit d'être une pensée tragique, c'est-à-dire aporétique, déceptive, inconsolée. Et qu'une sagesse qui se sait insuffisante et insatisfaite (une sagesse tragique) vaut mieux, de ce point de vue, que la suffisance d'une sagesse prétendument satisfaite. Cela amène à prendre quelque distance avec Épicure, Spinoza, Nietzsche et Marx. Et à se trouver plus proche de Lucrèce, de Montaigne ou du dernier Althusser.
Qu'est-ce que le temps ? la succession du passé, du présent et de l'avenir.
Mais le passé n'est pas, puisqu'il n'est plus. ni l'avenir, puisqu'il n'est pas encore. il ne reste donc que le présent, qui est l'unique temps réel.
C'est ce que j'ai voulu essayer de penser jusqu'au bout. il en découle une métaphysique, qui est celle de l'être-temps. et une éthique, qui est celle de l'acte.
Métaphysique du présent, et pour le présent : l'éternité, c'est maintenant.
Ethique du temps, et pour le nôtre : exister, c'est insister ; vivre, c'est résister.
A. c. -s.
Introduction au droit de l'entreprise Préface, 9 Introduction générale à l'étude du droit, 11 A / Notions générales, 11. - B / Les sources du droit, 17. - C / L'organisation de la justice, 29. - D / L'action en justice, 34. - E / La preuve des droits subjectifs, 43.
Première Partie. ÉLÉMENTS ESSENTIELS DE DROIT CIVIL 1. Les personnes et l'entreprise, 55 SECTION I - Règles communes à toutes les personnes, 55 A / La personnalité juridique de la personne physique, 55. - B / Les actes d'état civil et le nom, 60. - C / Le domicile, 64. - D / Le patrimoine, 66. - E / Les incapacités. Notions générales, 70. - F / Les incapacités : les mineurs incapables, 73. - G / Les incapacités : les majeurs incapables, 84. - H / Situation des gens mariés, 94. - I / Situation des étrangers, 102.
SECTION II - Les personnes morales, 105 A / Classification des personnes morales, 105. - B / La personnalité morale, 108.
2. L'entreprise et les biens, 113 SECTION I - Classification des biens, 113 A / Les différentes classifications, 113. - B / Les meubles et les immeubles, 119.
SECTION II - Les droits réels, 125 A / La propriété, 125. - B / La propriété incorporelle, 129. - C / Les droits réels démembrés, 137. - D / Les droits réels accessoires, 140.
SECTION III - Modes d'acquisition des droits, 148 A / Modes originaires, 149. - B / Modes d'acquisition de la propriété par transfert, 156. - C / Acquisition de propriété à cause de mort, 157.
3. L'entreprise et les contrats, 161 SECTION I - Théorie générale du contrat, 161 A / Le contrat : notions générales et classification, 161. - B / Formation des contrats, 165. - C / Effets des contrats, 174. - D / Exécution des contrats, 179. - E / Inexécution des contrats, 187.
SECTION II - Dispositions communes aux obligations, 193 A / Modalités des obligations, 193. - B / Obligations plurales, 197. - C / Transmission des obligations, 200. - D / Extinction des obligations, 204.
SECTION III - La responsabilité civile, 208 A / Notions générales, 208. - B / Les différents cas de responsabilité civile, 210.
Deuxième Partie. ÉLÉMENTS ESSENTIELS DE DROIT COMMERCIAL 1. L'entreprise, 219 SECTION I - L'entreprise commerciale individuelle, 219 A / Les actes de commerce, 219. - B / Le commerçant, 227. - C / Les conditions de l'exercice du commerce, 230. - D / Les obligations du commerçant, 233. - E / Les époux commerçants, 241.
SECTION II - Les entreprises individuelles non commerciales, 244 A / L'artisan, 244. - B / Agriculteurs. Professions libérales, 247.
SECTION III - Le droit de l'entreprise sociétaire, 249 A / La société, 249. - B / Classification des sociétés, 255. - C / Les associations, 268.
2. Le fonds de commerce, 271 A / Éléments du fonds de commerce, 271. - B / La vente du fonds de commerce, 277. - C / La location-gérance du fonds de commerce, 282. - D / Le nantissement du fonds de commerce, 285.
3. Les moyens de paiement et de crédit, 289 A / Les comptes en banque et le chèque, 289
Ce Traité du désespoir et de la béatitude a été publié dans la collection " Perspectives critiques " en deux volumes : 1. Le mythe d'Icare (13 éditions) ; 2. Vivre (6 éditions). Ces livres ont été les premiers succès de l'auteur, encore jeune professeur de terminale. Ils sont devenus des classiques pour tous les apprentis philosophes préparant le bac.
L'auteur y préconise l'invention d'une sagesse matérialiste, une sagesse sans désespoir, une sagesse pour notre temps. Le tout constitue une éthique ou une philosophie, une sagesse pour essayer de vivre désespérément et joyeusement.
André Comte-Sponville est agrégé de philosophie, professeur à l'Université de Paris Sorbonne. Il a publié de nombreux ouvrages dans la collection " Perspectives critiques ".